17 novembre 2024

Art du bricolage, bricoleurs d’art

« L’art ne vient pas coucher dans les lits qu’on a faits pour lui ; il se sauve aussitôt qu’on prononce son nom : ce qu’il aime c’est l’incognito. Ses meilleurs moments sont quand il oublie comment il s’appelle », Jean Dubuffet, 1960

Des artistes ont choisi des modes d’implication en société n’obéissant pas nécessairement aux règles d’un « monde de l’art » validées par la reconnaissance d’un public, de pairs, de l’institution ou du marché. La reconnaissance, lorsqu’elle a lieu malgré tout, est plus une conséquence que le résultat d’une intention, et n’est pas sans troubler ou subvertir les catégories et les conventions artistiques ni interroger le rôle d’un art en société. Nous parlons ici de bricoleurs-artistes ou d’artistes-bricoleurs. Bricoleurs ou artistes ? Les termes sont plus facilement mis en opposition qu’en synergie. L’art du bricolage se nourrit du flou de la frontière pour générer un entre-deux qui prend la dimension d’un écosystème. Il ne peut être rangé ni dans un cadre disciplinaire ni dans un mouvement conceptuel ou esthétique. Ne pas pouvoir cataloguer : c’est peut-être cela qui dérange et pousse à refuser à cette pratique une dimension artistique. « C’est une posture difficile, car justement “hybride ” et en marge. Elle implique d’être dans un entre-deux entre action et recherche. Cela induit souvent d’accepter le principe d’incertitude, de choisir une route parfois bien sinueuse. Et même plus, être dans une démarche de “bricolage” alors que l’ensemble de la société indique que cela ne peut être qu’un état transitoire lié surtout au manque d’expériences et de savoirs, plutôt qu’une réelle démarche de travail et d’économie »[1]. N’étant rangés nulle part, les artistes bricoleurs sont ailleurs, invisibles : ni les modes de diffusion classique passant par les lieux dédiés, ni les standards de l’industrie culturelle vulgarisant une culture mainstream ne les identifient. Leur art ne fait pas école, il ne se transmet pas de manière académique. dlotview-64918-1 Nous avons rencontré quelques-uns de ces jeunes artistes bricoleurs pour qui « la vraie création ne prend pas souci d’être ou de n’être pas de l’art », comme l’affirmait Jean Dubuffet à propos de l’art brut, et pour qui le bricolage n’est pas une simple méthode de travail, mais une démarche existentielle. S’agit-il de postures individuelles ou se trouve-t-on devant l’émergence d’une nouvelle forme, non seulement esthétique et artistique mais aussi socio-économique et politique ? Ce que nous pouvons déjà dire, c’est que les notions de « tiers espace » ou d’« espaces intermédiaires de l’existence », d’« art populaire » ou d’« art sociétal » sont abordées, depuis déjà plusieurs années, dans notre Laboratoire d’Innovation Sociale par la Recherche-Action[2]. Les rencontres avec une nouvelle génération de jeunes « bricoleurs » ont été facilitées par le fait que nous sommes aussi dans un bricolage des sciences, propre à la recherche-action. Nous nous retrouvons dans une démarche collective, à puiser nos matériaux dans des situations communes, comme celles suscitées par certains groupes innovateurs tels que les « Bricoleurs d’avenir », qui organisent des rencontres d’artistes avec des populations [3], ou que « La Brume Roze », qui propose des « concerts – ateliers – rencontres » selon un principe de production artisanale représentée par le label indépendant « La Machine Folle »[4]. Par ailleurs, le champ réflexif ouvert par les arts « autres » (Bruts, Singuliers, Outsider) nous apporte des éléments pertinents de correspondance[5]. Comprenons que notre écrit fait partie de l’expérience : ce n’est pas là une définition, puisque l’absence de définition participe de la nature même de notre objet de recherche. Comme si l’origine se plaçait devant et se construisait un peu plus à chaque pas, à la manière dont le marcheur s’invente une manière de cheminer. Nous sommes engagés dans ce processus « cheminatoire », qui n’hésite pas à emprunter les voies de traverse, qui se laisse guider par les rencontres et se risque, dans cette improvisation, à l’ouverture de nouvelles perspectives : « Je continue à chercher ce point d’alchimie magique que me procure la rencontre de l’autre, et le moment précis où la rencontre devient évidente »[6]. Engageons donc cette marche d’approche, tout en sachant que chaque virage ou intersection nous laisse entrevoir autant de façons de concevoir un art du bricolage.

La culture contre le culturel

« Il se peut que, sur les ruines de la culture, une création d’art renaisse, orpheline, populaire, étrangère à tout circuit institué et à toute définition sociale, foncièrement anarchiste, intense, éphémère, dégrevée de toute idée de génie personnel, de prestige, de spécialisation, d’appartenance ou d’exclusion, de clivage entre la production et la consommation. Ce serait la ruine de toute valeur et l’avènement de l’ “homme du commun”, d’un homme sans modèles, radicalement irrespectueux et par conséquent créateur »[7].

À partir du XVe siècle, le verbe bricoler prend la signification d’une démarche hésitante ou de travers : « Aller par des voies obliques, par-ci, par-là, en zigzag » ou encore « de manière imprévue ». Le nom « bricole » veut d’abord dire « faux, tromperie », puis il devient synonyme d’activité subalterne : « Travail de hasard, mal rétribué. L’ouvrier dit qu’il fait des bricoles, de la bricole, en prenant du travail où il en trouve, en attendant que son métier ordinaire reprenne. Cette expression est tirée de la bricole qu’on se met au cou pour traîner les petites voitures »[8]. Aujourd’hui, c’est toujours en ce sens que l’on oppose le « travail d’amateur » à l’Art devenu la spécialité d’un milieu. L’amateurisme ne nécessiterait pas de qualités spécifiques. Ce serait un travail peu soigné, intermittent, exempt de connaissances techniques, étranger à la finalité d’un ouvrage de goût. Selon cette approche, le bricolage répondrait plus à une nécessité –la réparation ou la transformation d’objets– qu’à une finalité désintéressée –la beauté du geste dont peut s’enorgueillir l’art. Dans sa version ludique, apparue au XXe siècle avec le temps libre, le bricolage est cantonné à une activité de loisir propre aux classes populaires, volontiers considérées comme dépravées ou dangereuses et qu’il faut donc canaliser dans des « occupations saines », comme le jardinage dans les jardins ouvriers. Le barbare, c’est toujours l’Autre, qu’on s’en trouve séparé par des frontières extérieures ou intérieures, physiques ou symboliques, cet Autre que le maintien à distance permet de mieux exploiter. Ce n’est pas sans raison que l’art du bricolage est associé à l’esprit de la combine, fait d’ingéniosité et de ruse, qu’il est apparenté à un braconnage culturel débusquant la création dans la banalité de la vie quotidienne, ce que Michel de Certeau appelait « l’obscur entrelacs des conduites journalières »[9]. Une forme de culture de résistance qui échappe au contrôle social de l’esthétique bourgeoise, au pouvoir de la tradition, de l’institution et du marché, autrement dit au « culturel ». Le culturel se distingue de la culture dans la mesure où il élude la portée politique d’un processus de transformation individuel et social. En tant qu’instance de légitimation d’un corps intermédiaire chargé d’évaluer, transmettre, produire et diffuser les éléments de la culture, il favorise la dépolitisation. L’apparition des métiers de la culture et des professions artistiques participe de ce mouvement : le culturel a phagocyté la culture en agissant à la manière d’une « surcouche », décalée de la réalité. À la façon dont l’industrie du disque réagit face à la culture hacker (où de nouveaux « pirates » prennent la place des anciens barbares), le culturel s’organise selon un principe identitaire, défensif et conservateur, tout en se parant des habits du changement. Il fait apparaître comme « tendance » les préoccupations de sa propre préservation. Pour cela, la culture doit rester inoffensive, policée et commercialisable. « Nous sommes empêtrés dans une chaîne lourde d’intermédiaires et de décisions sur laquelle nous n’avons aucune prise : on dérive sans pouvoir agir. Par opposition avec le monde industriel, nous entendons expérimenter des alternatives à la production artistique. Nous cumulons diverses pratiques et compétences qui construisent des formes hybrides de travail et d’économie entre amateurs, professionnels, disciplines, compétences, formations, statuts, autodidaxie, démarches individuelles, collectives… Au vu de l’aspect bricole et incertain de l’entreprise, nous décidons de l’expérimenter d’abord sur nous avant de proposer la démarche à d’autres et de la diffuser »[10]. Le bricolage cherche à se déconditionner du culturel en refusant d’entrer dans des logiques de projets repérables ou d’adhérer à des intentions artistiques programmées et programmables. Il part des matériaux disponibles et des ressources mobilisables dans une situation donnée et place l’humain au cœur des choses, mais sans prétendre naïvement à la rupture totale. « Dans le monde du bricolage, “on s’autorise”, c’est différent de la hiérarchie culturelle. On n’a pas de compte à rendre, pas de négociation de création. Ce sont les personnes que l’on rencontre en premier. Ce ne sont pas forcément des marginaux, mais ce sont des gens du peuple ou qui ont un engagement dans le peuple. Je crois que l’on peut fabriquer la société autrement, à travers des rencontres, des actes qui peuvent être considérés sans importance, éphémères, mais dont les effets peuvent être très profonds sur les individus et leur entourage. Les bricoleurs allient cette dimension civique, citoyenne, éthique et esthétique »[11]. Le bricolage est bien un acte de culture, mais il déconstruit les codes du culturel pour mieux replacer au centre une pensée politique qui mette en lumière le travail de la culture, dans des zones populaires souvent reléguées ou dans des interstices peu valorisés de l’expérience humaine. Si le milieu de l’art tend à extirper l’extraordinaire de notre condition, le bricolage en symbolise l’« infra ordinaire », au sens où l’entendait Georges Perec [12]. C’est la conscience d’être en mouvement dans ces moments infimes où notre corporéité s’accorde avec la pulsation du monde. Ce n’est pas un corps chorégraphié ni même pensé, c’est un « proto mouvement ». Pourtant, c’est le prélude à tout mouvement social (méta-mouvement). L’art du bricolage décrit précisément cet « état du mouvement » où un simple bricolage culturel peut devenir un mouvement culturel. C’est une démarche « première » dans le sens où elle est primordiale, plutôt que « primitive», cette dernière appellation étant trop connotée par une vision évolutionniste. Le bricoleur n’est pas un sauvage égaré au XXIe siècle et le bricolage n’est pas un stade d’évolution précédant le professionnalisme, autrement dit une période enfantine insouciante avant l’âge adulte responsable, une pratique populaire de loisir mal dégrossie, même si « l’art majeur », en se distinguant de « l’art mineur » et de sa supposée immaturité, s’évertue à légitimer les frontières qui encerclent cet « ennemi de l’intérieur ». Il y a sans doute raison de s’inquiéter car le bricolage a sa propre autonomie, comme forme sociale et culturelle totale, et, par conséquent, sa propre façon d’organiser, de classer, de hiérarchiser ses propres modes de validation et de jugement, distincts de ceux du monde de l’art. En ce sens, le bricolage ne s’oppose pas à une professionnalité : il conduit à la création, mais par d’autres chemins que le professionnel. « Nous nous sentons plus proches des problématiques et démarches des petits producteurs ou artisans que de l’univers culturel : un besoin de reprendre la maîtrise de l’ensemble de la chaîne de production, tant pour en garantir la cohérence et la qualité des productions, que pour reprendre la maîtrise de l’économie. La manière dont on produit quelque chose au monde comporte des enjeux transversaux tant économiques qu’humains, sociaux, artistiques ou culturels. La démarche artisanale consiste à développer une activité, un travail en partant et gardant au centre cette cohérence humaine : échelle, rapport au temps et à la vitesse, non-division du travail, non-production de masse et uniformisée, articulation cohérence fond et forme, travail fait avec soin, notion de sur-mesure, de maîtrise des étapes de production, travail en local »[13]. Le bricolage ne peut se laisser appréhender selon les catégories disciplinaires et esthétiques habituelles. Il constitue même une « antidiscipline ». Il y a autant d’arts du bricolage que d’artistes bricoleurs. On peut être bricoleur sans être reconnu artiste et artiste sans être bricoleur. Le bricoleur ne prétend pas être le seul signataire ni l’unique dépositaire de l’œuvre. C’est un roi dans son domaine, mais nu, sans territoire et sans souveraineté. L’œuvre d’art est désacralisée, elle tombe de son piédestal. Le bricoleur choisit de se dire « éclairant » plutôt que « brillant », « artisan » plutôt d’« artiste », « bâtisseur » plutôt que « créateur ». Il préfère l’anonymat à la gloire, l’esprit de la rencontre rugueuse à la relation lisse et codifiée, le travail peu visible, en atelier, à l’exposition dans des lieux consacrés. Et il conteste la notion même de « public », en inversant souvent le dispositif scénique lors des restitutions du travail collectif, en récusant le format habituel du spectacle pour permettre à un « public non conventionnel » de devenir acteur et à l’acte artistique de se faire le reflet d’un tel processus de coproduction. « La notion de public et de participation nous pose bien des problèmes. On “évalue” ces questions des publics à travers leurs capacités à consommer du projet culturel, du chiffre et de l’économiquement viable… En revanche, l’aspect (d’ailleurs bien difficile à définir) de ce qui se rapprocherait de l’idée d’un “travail de la culture” est beaucoup moins posé dans les projets ou les évaluations »[14]. Si l’on considère que ces configurations humaines sont provisoires et non transmissibles, la variété des chemins susceptibles d’être empruntés peut être perçue comme une richesse ou comme une fragilité. De fait, on ne trouvera le bricolage répertorié dans aucun dictionnaire d’art ni manuel de techniques artistiques. Il n’est mentionné nulle part en tant qu’école, courant, mouvement ou même groupe. Il échappe donc à toute définition et se trouve oublié dans les tiroirs de l’histoire. Pourtant, l’art du bricolage n’est pas le produit d’une opportunité contextuelle, c’est d’un choix délibéré. En ce sens, il se caractérise comme un art « singulier » par un certain nombre de critères : la prise en compte de l’aléatoire dans l’œuvre, le dialogue ou la confrontation avec les matériaux, l’absence de projet au profit du processus, la revalorisation par le détournement des situations déclassées ou reléguées. Voyez-les un à un.

La prise en compte de l’aléatoire

« La réalité est un foutoir, et c’est ça qui est excitant. Il faut se demander jusqu’à quel point on a peur du chaos et jusqu’à quel point l’ordre nous rend heureux »[15].

Dans l’art du bricolage, l’indétermination, l’incertitude, l’aléatoire, la contingence, le hasard, le chaos sont des éléments constitutifs de l’œuvre, bref, tout ce que rejette et exècre le politique quand il prend le nom de sécurité, le moraliste celui de raison, le savant celui de scientificité et l’art officiel celui d’intentionnalité. « Le travail esthétique du contenu des objets artisanaux (musiques, livres ou nouvelles) est un processus autonome, quasi permanent, chaotique, hors cadre du label, qui se produit soit à l’échelle individuelle, soit concerne quelques individus, sans organisation ni méthodologie précise, selon un temps très variable. Une fois le contenu “terminé”, il rejoint un espace collectif où il est discuté pour être mis en forme suivant la démarche artisanale. Il subit une sorte de négociation entre tous les acteurs de la chaîne. Le travail consiste à la fois à chercher une cohérence entre la création de l’esprit (contenu) et sa forme physique (contenant) »[16]. L’entrée en situation du bricoleur-artiste n’est pas programmée, elle ne s’inscrit pas dans un cadre préétabli. Lui-même n’attend rien et n’est en principe pas attendu. S’il existe une attente déjà conformée par des habitudes culturelles ou des représentations sociales, alors il cherche à contourner ou détourner ce conformisme. Il préfère que l’opportunité de la rencontre ou même, plus généralement, qu’un événement provoque les conditions d’investissement. Tout élément peut devenir matériau et déclencheur de la situation : une rencontre fortuite, un obstacle, une action comme une inaction, un plein comme un vide, une droite comme un zigzag, des brides de langage ou une phrase en énigme cachée… On n’en maîtrise donc pas les paramètres. Telle est la condition de l’entrée en situation. Cette incertitude est le moteur même du processus de création, qui fait de l’improvisation un outil de travail. Ainsi, les bricoleurs-artistes peuvent intervenir dans n’importe quel lieu, fermé ou ouvert, privé ou public, dans une structure comme dans la rue, en périphérie comme au centre. Cette mobilité spatio-temporelle les rend d’autant plus incernables et incontrôlables. La mise en œuvre s’adapte au hasard des opportunités et les matériaux sont produits selon les circonstances associées aux différents environnements rencontrés. Là où l’intervenant artistique classique verrait une trop grande dépendance au « social » propre à une implication humaine en situation dont il ne maîtriserait ni les tenants ni les aboutissants et dont les matériaux lui échapperaient, le bricoleur au contraire voit la possibilité de s’affranchir des règles préétablies, d’ouvrir à l’infini un champ d’expérimentation et d’offrir aux personnes engagées avec lui la coproduction d’une œuvre collective. Que cette production soit jugée trop hétérogène ou chaotique pour constituer une véritable œuvre, conformément au credo du milieu de la culture importe peu ici. Elle offre une connaissance inattendue et inégalée de notre réalité contemporaine par les perspectives qu’elle dégage, et procure les conditions d’une emprise sur la réalité ainsi que la capacité de la transformer : « Bricoler c’est redonner à l’art une dimension relationnelle. La réalité du bricoleur est hétérogène, déhiérarchisée, elle est aussi libératrice »[17]. Ainsi le bricolage ne s’appuie pas sur une forme structurée, mais il aboutit à la création d’un ensemble structuré, d’un univers que chacun d’entre nous est capable de développer dans sa compréhension sensible et intelligible du monde. En ce sens, il s’apparente à une science du concret, validée par des capacités spécifiques, inventives et imaginatives : « l’artiste tient à la fois du savant et du bricoleur : avec des moyens artisanaux, il confectionne un objet matériel qui est en même temps objet de connaissance »[18]. Le bricoleur-artiste se pose naturellement non comme superviseur ou ingénieur qui expliquerait le monde par sa seule intelligence technicienne, mais comme intermédiaire entre un processus aléatoire et le monde. Il ouvre un dialogue avec le monde par l’intermédiaire de la forme produite et permet à une intelligence sociale de s’exprimer.

L’absence de projet au profit du processus

« Puisque tu n’as rien, tu vas faire quelque chose de magnifique. L’art est au coin de la rue, il suffit d’avoir des yeux de poète »[19].

Dans un projet classique, les éléments aléatoires ou contingents appartenant à une situation sont généralement intégrés dans le cadre d’une structure. Pour le bricoleur, en revanche, ce sont les situations elles-mêmes, avec leurs dimensions incertaines, qui constituent la structure. Un projet culturel va associer des « publics », un projet urbain des « habitants » dans une forme de structuration prédéfinie. Les notions de « publics » ou « d’habitants » contribuent en cela à la construction sociale de l’intervention en projet, elles sont au service d’une assignation mono-identitaire qui permet de canaliser et d’orienter les modes de participation. De fait, le projet est devenu dans nos sociétés un modèle d’injonction au service de l’économie néolibérale. Dès la plus tendre enfance, nous sommes sommés de faire des projets. Le bricoleur n’est ni « porteur de projet », ni « chef de projet », mais il s’inscrit dans un processus où les différents acteurs concernés sont coproducteurs du sens. La notion même de projet lui est étrangère, car il ne cherche pas à diriger les personnes ni à utiliser les matériaux selon une intention initiale qu’il projetterait sur une réalité à conformer ensuite à cette vision. « Les gens attendent un projet, une collaboration, un thème, un show, une prestation, une performance. Si on a déjà des idées préconçues, si on sait ce qui va arriver, il ne se produit rien. Ne pas faire de l’animation, ne pas vendre un spectacle même si cela rassure, ne pas reproduire simplement ce qui marche, ne pas avoir de réponses figées. On a chacun nos compétences, on s’attend à rien, mais on a une ébauche de construction : mettre notre savoir-faire au service de la rencontre, partager l’énergie, être généreux, surprendre. Au fur et à mesure, on se modifie, nous, dans ce que l’on propose. On casse le code. On arrive à traiter la matière récoltée sans porter un jugement. »[20]. Le bricoleur n’a pas une visée hégémonique sur la réalité, mais il invente une nouvelle façon de la regarder. Il part de la « maîtrise d’usage », c’est-à-dire de la manière dont chacun maîtrise l’espace selon l’usage qu’il en fait et, à partir de là, il développe une expertise sur sa propre pratique, il revient sur sa propre expérience. C’est ainsi que chacun peut s’approprier les matériaux disponibles pour collaborer à la construction d’une situation et prendre la liberté de penser la réalité autrement. L’artiste accepte de dialoguer avec l’usager, d’être au service d’ un art « impliqué » et « appliqué » ; il n’a pas peur d’être « utile ». Autant de conduites hérétiques pour l’Art qu’on peut qualifier « d’académique ». Pour des raisons parfois contraires, l’institution commanditaire éprouve autant de difficulté à comprendre que l’on puisse développer un engagement sans mettre sur pied un projet et que l’on puisse évaluer une situation sans passer par des critères disciplinaires. La revendication du bricoleur peut être reçue comme une provocation. De fait, il s’agit bien d’une transgression des règles du savoir techniciste qui maîtrise, manipule, inventorie, contrôle en se parant du langage de l’ingénierie culturelle. Le bricolage n’est pas plus « instinctif » que la conduite de projet n’est réfléchie et construite. L’absence de projet ne dépouille pas l’intervenant de sa capacité de réflexion, au contraire, elle crée les conditions d’une véritable réflexivité, puisqu’il n’y a nulle obligation de résultat, de production visible, de reconnaissance académique. Ce n’est pas parce que cette pensée est « non cultivée », au sens de non apprivoisée, qu’elle n’est pas subtile, comme le montre par exemple l’introduction de la dimension « collective » dans l’œuvre : « La construction d’une œuvre, bien qu’elle soit souvent issue, pour le travail de fond, d’une échelle individuelle, sa forme et toutes les étapes à suivre, une partie d’elle en somme, se jouent sur une échelle collective. Ainsi, ne pourrait-on pas considérer de nouveaux critères d’évaluation d’une œuvre : entre critères artistiques (qualité du travail esthétique, sa technicité, son caractère innovant…), mais aussi la manière dont elle est produite au monde, la qualité de sa forme, son rapport à l’économie, la qualité de l’espace collectif / réflexif qu’elle ouvre… ? »[21] Le bricolage n’a pas peur de cette complexité. Libéré du projet, il refuse la séparation entre recherche et action, activité manuelle et intellectuelle, création et production. Il peut alors opérer un aller-retour entre une application en situation, où l’on travaille sur des matériaux, et l’échange à partir de cette situation, prise elle-même comme matériau. En réalité, il s’agit de restituer, au cœur du processus, la dimension humaine dans toute son épaisseur. Cette épaisseur se retrouve naturellement dans la mémoire collective, la parole publique, le mouvement, elle apparaît aussi, tout simplement, au travers des faits anodins de la communication non verbale, du geste discret, du jeu d’interaction en situation. « Ce que je sais faire, c’est rencontrer des gens, passer du temps avec eux et leur donner la parole à travers la photo. Il faut du temps. Entrer dans la bulle des gens, cela ne passe pas obligatoirement par le langage oral. C’est un autre temps que le temps productiviste de la ville. Cela peut avoir du sens, même si c’est décousu, avec des silences, mais ce sont des silences remplis »[22].

Le dialogue avec les matériaux pour de nouvelles formes

« Les bâtisseurs sont des individus peu représentés dans le système officiel de la culture »[23].

« Si l’architecture spontanée suscite de telles questions, on peut simplement se demander qui est vraiment le fou : celui qui accepte sans broncher de vivre dans les carcans qui lui sont imposés, ou le bâtisseur qui s’abandonne totalement à son imagination ? »[24]

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Quand le travail sur les matériaux assure la médiation entre les individus dans une relation égalitaire, la forme intériorise les éléments issus des situations humaines, mais aussi le processus propre au bricolage et la destination de sa production. C’est sans doute dans « l’antre » de l’atelier que s’exprime le mieux le dialogue avec les matériaux. Ce n’est donc pas un hasard si les artistes bricoleurs affectionnent cet espace : il permet de dépasser la contradiction par la mise en synergie d’une démarche empirique tâtonnante, qui se traduit par un work in progress, et un processus de production structuré pouvant aller jusqu’à une restitution publique. « L’espace de l’atelier ouvre un travail entre création, transmission, production, diffusion, rencontres humaines, représentations… Il n’est ni artistique, ni pédagogique, ni social, ni socioculturel, ni… Il est humain ! C’est faire l’expérience d’une situation qui n’est pas découpée en cases, en projets, mais où l’on crée des liens, on construit, on évolue entre ces différentes dimensions. L’atelier ouvre un espace esthétique, d’expérience, où une cohérence humaine de travail non sectorisée va pouvoir se développer, produisant ainsi à travers les matières travaillées, non seulement des formes concrètes, mais aussi des sens qui nous construisent et nous transforment. »[25]. La matière humaine, qu’elle soit physique ou sociale, résiste ; elle ne se laisse pas si facilement travailler, obligeant l’artiste à établir un dialogue avec elle. Là est l’intérêt. Ainsi le tailleur avec une pierre ou le sculpteur avec un morceau de bois : ils doivent suivre l’orientation des sinuosités, se laisser guider par la qualité du grain, apprendre à prévoir les incidents occasionnés par des matériaux rebelles. Ce qui est vrai pour l’artisan charpentier, le compagnon tailleur de pierre, l’est également pour l’artiste-bricoleur quand il œuvre avec le matériau humain. Et c’est justement dans l’imprévu que se manifeste le style traduisant la personnalité ingénieuse du bricoleur. Des matériaux prennent forme quand un sens est relié à une fonction, dans un contexte social et culturel donné. C’est ce qui permet de dire que telle forme est une maison, une voiture, un objet d’art ou de collection. Mais c’est aussi ce qui autorise le décryptage de notre rapport au monde dans sa complexité et la compréhension de l’articulation du sensible et de l’intelligible, d’un signifiant (la forme, le contenant) et d’un signifié (les mots, le contenu). Ce rapport symbolique est fondé sur une convention arbitraire, mais il devient réalité à l’occasion de notre rencontre avec le monde, dans la relation à la fois charnelle et intelligente que nous avons avec les formes, dans le va-et-vient entre le chaud d’une implication humaine et le froid d’une conceptualisation. Nous comprenons que nous ne pouvons pas naître et être au monde si nous ne maîtrisons ni le langage ni l’élaboration des formes. Le bricolage déconstruit une langue et, au travers des formes créées, reconstruit une nouvelle grammaire. Par exemple, le principe même du « marronnage culturel » des descendants d’esclaves fut de se réapproprier ce processus, comme le fit le mouvement littéraire de la Renaissance de Harlem dans le ghetto new-yorkais des années 20, et, d’une autre manière, le jazz et la danse, mais encore la vague de la créolité dans les Caraïbes quelques décennies plus tard, à l’origine des mouvements anticoloniaux de libération. Dans cette perspective, nous pouvons dire que l’art du bricolage dans sa diversité et son universalité constitue un « Tout-Monde », au sens où l’entend Édouard Glissant[26]. Par le bricolage des matériaux, dans l’aller-retour entre forme et sens, peuvent s’établir des liens inédits, indépendamment d’une assignation identitaire ou des structures mentales d’une culture dominante. Il y a là une décolonisation de l’esprit, une intelligence propre au bricolage qui invente un art de vivre à travers l’art de faire. Et la force de cette intelligence est d’être sociale et non individuelle. A l’inverse d’une approche purement intellectuelle, dans laquelle c’est le concept qui guide le travail sur les matériaux, le bricolage est une forme de travail sur les matériaux qui permet d’élaborer une vision cohérente de la réalité. Au fur et à mesure que se développe son expérience, l’artiste- bricoleur acquiert un répertoire de configurations qu’il peut mobiliser lorsqu’il est en situation et qui le fait entrer en dialogue avec les matériaux. Il doit se plier à la radicalité des situations sociales brutes, des débris d’événements, des résidus de construction, des éléments de pratiques épars et de culture éclatée qui parsèment son chemin. Toutefois, ces contraintes et données ne sont pas un frein à sa liberté car il peut jouer avec elles, et, d’une situation limitée il sait exploiter les ressources insoupçonnées. Dans tous ses éléments éparpillés, il aperçoit des signifiants dont le rassemblement au sein d’une forme commune s’articulera avec un signifié. Dans une période de confusion entre la forme et le sens, quand l’esthétique devient un argument de vente et la culture une industrie commerciale, l’artiste-bricoleur distingue le faux du vrai. Avec lui, la forme est directement liée à une mise en mouvement, à la capacité de faire œuvre et, à travers elle, de se libérer de l’assujettissement. L’art du bricolage ne subit pas la réalité, mais il utilise les contraintes quotidiennes, les prédéterminations sociales, économiques et culturelles comme source d’inspiration et de création. Il rebondit sur les écueils comme le grimpeur se joue des obstacles rencontrés. Son avancée empirique, par tâtonnement ou approximation, constitue l’ingrédient même de l’aventure humaine. C’est pourquoi, il n’existe pas de méta-discours qui surplomberait le travail du bricoleur ni même d’analyse extérieure à la situation dans laquelle il est impliqué. La diversité des modalités du travail avec les matériaux offre de multiples possibilités d’exercice à une liberté individuelle, quel que soit le contexte plus ou moins fermé dans lequel ce travail se déroule.

La revalorisation des situations déclassées

« Je vis et je crée à partir des déchets, à partir de rien. La nuit je suis prince et le jour mendiant »[27]

Le bricoleur est un glaneur de matériaux et le bricolage un art d’accommoder des restes. Il offre la possibilité d’une seconde vie et d’une seconde chance aux objets, comme aux situations humaines. D’un rebut, il peut faire une œuvre, en libérant les personnes de l’assignation de l’échec, en défiant les limites imposées par les normes admises. Il ne peut compter que sur lui-même et sur le processus qu’il enclenche, sans grands moyens, en fonction des matériaux mis à disposition par l’environnement. Il offre donc une alternative économique au prêt-à-consommer de la standardisation. Il est une forme de contestation explicite du mercantilisme de l’industrie culturelle et de l’uniformisation de la production : « Ce sont des opérations d’appropriation et de réemploi, des pratiques de détournement économique. Cet art de combiner est indissociable d’un art d’utiliser, il forme un mixte de rite et de bricolage »[28]. Les logiques autonomes et solidaires de l’« open source », du « do it yourself », des « fab-labs » réunissent producteurs et usagers dans une association de forme coopérative. L’importance actuelle de leurs émergences confirme la pertinence d’un art du bricolage : « Nous nous trouvons dans une de ces époques charnières où le bricolage prend une place particulièrement importante. Il nous faut inventer notre culture, parce que les cadres préétablis sont remis en question. Pour un bricoleur, agir sur le monde est un acte de création, c’est une manière de réaffirmer son existence et d’apporter la preuve de l’apport que peut avoir la culture populaire »[29]. L’art du bricolage ouvre ainsi le champ à une démarche personnelle et collective qui est créative, imaginative, innovante, originale et où chacun peut développer sa propre recherche, laisser ses traces, construire ses propres références. En cela, on peut le dire création populaire, « art par le peuple », car il développe des moyens d’expression indépendants, sans imposer de modèles, sans faire preuve de dirigisme ni obéir aux critères de production artistique d’« excellence » de « l’art pour le peuple ». Il ne s’agit pas de faire de la réparation sociale ou du traitement social par la culture, mais d’ordonnancer autrement les matériaux de la réalité dans une vision différente du monde et, par ce changement de perspective, de donner une prise sur le monde, particulièrement à ceux que l’on caractérise comme « sans perspective », ceux qui ont connu l’enfermement pénitentiaire, asilaire ou la relégation prolétaire, identitaire, territoriale ou sociale et que l’on « met au rebut ». L’art du bricolage est pour l’individu un acte fondamental d’appropriation de son espace vital qui lui permet de recomposer l’unicité de son parcours de vie. Chacun d’entre nous peut être ce travailleur de la culture et, grâce à la métamorphose du commun en création singulière, trouver réponse à ses attentes, atteindre une forme d’expression esthétique universelle.

Un art outsider

« Sous la garde des géants, j’ai placé l’épopée des humbles, courbés sur le sillon », Ferdinand CHEVAL, inscription sur la façade du Palais Idéal. Il est bon de rappeler que, dans un monde où la « normalité » est érigée en concept politique, la tension créative n’est jamais normale. Elle pousse hors des frontières les bricoleurs-artistes, qui sont détachés des poncifs académiques, refusent le culturel de l’institution et du marché et rompent avec les traditions héritées du passé. Les bricoleurs font de leur vécu une œuvre : ils refusent de séparer l’art de la vie. Ils pourraient se retrouver mis au ban. C’est tout le contraire qui arrive, car, en banlieue ou ailleurs, ces exilés de l’intérieur explorent les anfractuosités, les zones quadrillées non affectées ou désaffectées –Zep, Zus, Zup, Zru [30] – pour les transformer en Zon’Art. Ces briscards du bricolage deviennent de nouveaux points de référence d’une centralité interstitielle ; ils facilitent une mobilité spatiale mais aussi mentale et sociale et ouvrent ainsi l’éventail des choix existentiels. Au final, l’art du bricolage se conçoit comme un art total, produit par des bâtisseurs paysagistes producteurs de formes. Son imprévisibilité échappe aux procédés préfabriqués et sectoriels. Au travers des dispositifs qu’il réinvente chaque jour, en se faisant atelier artisanal ou art d’accommoder les restes, il aménage des espaces écosystémiques, des systèmes de relations interdépendantes qui régulent une diversité. L’utilisation des matériaux bruts, l’absence d’apprentissage et d’appartenance à une école qui caractérisent l’art du bricolage, le rendent plus accessible à l’homme du quotidien qu’à l’homme « cultivé ». Aussi n’est-il pas sans interroger le statut de l’artiste et la place de l’art dans la société. Art autodidacte et indiscipliné, individuel et collectif, commun et hors norme, éphémère et éternel, présent et intemporel, simple et complexe, ordonné et chaotique, utilitaire et libre, cru et élaboré, en marge et central, il est un art fait par tous. Mais pas seulement l’art des enfants, des naïfs, des asociaux ou des fous, même s’il privilégie la parole de ceux qui sont étrangers au monde de l’art et à leur propre milieu. Or, c’est la dialectique de tous ces éléments indissociables qui nous met en mouvement. C’est la connexion intense entre le sensible et l’intelligible qui fait l’essence irréductible de chaque individu et, en même temps, fonde la société. L’art du bricolage nous apparaît donc comme un vaste champ des possibles, encore inexploré. Il nous renvoie à l’urgence de créer, par tous les moyens imaginables. Hugues Bazin, in Les cahiers d’Artes, « L’art à l’épreuve du social », Presses Universitaires de Bordeaux, 2013


[1] Anton, « Production artisanale “La Machine Folle” », document électronique 2012, http://www.lamachinefolle.com/upl/doc/production_artisanale_-_tiers_espace_2.pdf
[2] www.recherche-action.fr
[3] Hervé Sika directeur de la Compagnie Mood, « Les Bricoleurs d’Avenir » sont une équipe d’artistes venus d’horizons divers (danse, théâtre, cirque, musique, photographie, vidéo…) qui vont à la rencontre d’une ville, d’un quartier et de ses habitants, à partir de ce qu’ils sont et du médium dont ils disposent. De rencontres en pérégrinations diverses, les artistes partagent leur pratique et récoltent de la matière. À l’issue de leur résidence, ils proposent une restitution dans un lieu choisi de la ville sous la forme d’une déambulation. L’objectif des Bricoleurs est de travailler dans l’instantané, de se nourrir des architectures, des atmosphères et des impressions laissées par les rencontres pour envisager une autre façon de créer (http://ciemoodrv6k.over-blog.com).
[4] Animée par Anton qui « fait des trucs », « la Machine Folle est une petite structure qui développe une activité hybride entre création (diverses disciplines, esthétiques…), production (livres objets, disques, formats numériques, fabrication, diffusion, économies…) et transmission (ateliers artistiques, ouverture espaces transferts internes / externes…), le tout dans une « démarche artisanale » (www.lamachinefolle.com – www.labrumeroze.com – www.anton-invention.com).
[5] En particulier à travers l’ouvrage de Marielle Magliozzi, Art brut, architectures marginales : un art du bricolage, Paris, L’Harmattan, 2008.
[6] Hervé Sika,, « Conférence gesticulée et dansée – Be Bricoleur Baby », document de travail interne dactylographié, 2012.
[7] Michel Thévoz, L’Art Brut [1975], Genève, Albert Skira, 1995.
[8] Atelier historique de la langue française Littré, Paris, Redon édition 2004.
[9] Michel de Certeau, L’Invention du quotidien, tomes 1&2, Paris, Gallimard, 1990 (1re éd. 1980).
[10] Anton, op. cit.
[11] Hervé SIKA, chorégraphe, « Cie Mood », entretien, 2012.
[12] L’Infra-ordinaire, Paris, Éditions du Seuil, collection « Librairie du XXe siècle », 1996. Voir également du même auteur, Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, Paris, Christian Bourgois, 1975 et Espèces d’espaces, Paris, Galilée, 1974.
[13] Anton, op. cit.
[14] Ibid.
[15] A. C. Clarke, Rendez-vous avec Rama, Paris, J’ai Lu, 1980 (1ère éd. 1973), p. 25.
[16] Anton, op. cit.
[17] Hervé Sika, « Conférence gesticulée et dansée – Be Bricoleur Baby », op. cit.
[18] Claude Lévi-Strauss, « La science du concret », in La Pensée sauvage [1964, Plon], Paris, Presses Pocket, 1985, pp. 30-49
[19] Bodan Litnianski, cité in Olivier Olivier Thiebaut, Bonjour aux promeneurs ! Sur les chemins de Part brut, Editions Alternatives, Paris, 1996.
[20] Membres des « Bricoleur d’Avenir », Cie Mood, entretien 2012.
[21] Anton, op. cit.
[22] Benoit Facchi, photographe des « Bricoleurs d’Avenir », Cie Mood, entretien 2012.
[23] Marielle Magliozzi, op. cit. p. 111.
[24] Maarten Kloos, Le Paradis Terrestre de Picassiette, Paris, Ed. Encre, Coll. « Les Banlieues de l’art », 1979, cité in Marielle Magliozzi, op. cit. p. 227.
[25] Anton, « La brume Ro[z]e », document électronique, http://www.labrumeroze.com/wp-content/uploads/2012/10/la-brume-roze-concerts-ateliers-rencontres.pdf
[26] Edouard Glissant, Tout-monde, Paris, Gallimard, 1995 ; ainsi que Traité du Tout-Monde. (Poétique IV) Pari, Gallimard, 1997.
[27] Chromo in « Chomo », documentaire (France, 26 mn) réalisé par Antoine de Maximy, 1985.
[28] Véronique Bedin et Martine Fournier (dir.), Michel de Certeau, Paris, La Bibliothèque idéale des sciences humaines, Editions Sciences humaines, 2009, p.78.
[29] Hervé Sika, « Conférence gesticulée et dansée – Be Bricoleur Baby », op. cit
[30] Zones d’Éducation Prioritaire, Zones Urbaines Sensibles, Zones à Urbaniser en Priorité, Zones de Redynamisation Urbaine.

Hugues Bazin

Chercheur indépendant en sciences sociales,

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