Présentation
Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.
L’idée de Lez’arts est de proposer une activité culturelle en milieu rural, dans les périodes non estivales sur le territoire intercommunal (Communauté de communes de Ventadour – Égletons – Monédières). On est tous de la même génération, tous résidents dans la campagne d’ici.
Très vite on a voulu engager des partenariats avec des assos locales, on n’est pas là pour faire à leur place ou mieux qu’elles, mais avec elles, et peut-être aussi avec une autre approche. Il nous faut refaire le lien avec les foyers ruraux ou les comités des fêtes. Nous voulons toucher une population qui n’est pas le public habituel des événements culturels, aller dans des communes où nous n’avons encore rien fait.
Notre idée c’est de se faire plaisir. L’envie est de mélanger plusieurs arts et de faire en sorte que les gens se rencontrent. Puis qu’ils puissent développer ce qu’ils ont envie de faire.
Nous organisons ainsi des soirées complètes avec des repas en lien avec le spectacle. Nous pensons que la qualité du repas joue aussi et que cet état d’esprit facilite l’échange de savoirs, notamment entre les générations, avec les « anciens ». C’est la convivialité et le contact humain qui marquent les gens, tout en étant l’occasion de leur faire voir un beau spectacle. Cela provoque de superbes échanges, comme avec les femmes turques venues récemment par le biais du MLAP (Egletons).
Lez’arts, c’est une manière de dire qu’on vit ici, on fait des choses ici, le monde rural n’est pas qu’un décor où des personnes viennent en vacances ou à la retraite. On peut habiter et être actif sur le territoire à l’instar de notre engagement associatif qui offre des marges de manœuvre et des libertés d’agir.
Il n’y a pas de salarié dans l’association. Nous sommes sur des budgets très bas à l’année qui dépendent des manifestations avec des prix d’entrée bas, ce qui ne nous empêche pas de faire des spectacles professionnels de qualité. C’est aussi l’investissement bénévole qui amène les ressources complémentaires au fonctionnement (transport en véhicules personnels, réparations, entretien…).
Problématiques
Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.
Le territoire apparaît comme ressource et un relais de l’action collective. Le développement culturel n’est pas dans ce sens séparable d’un développement local et dépasse une logique gestionnaire par exemple en termes d’équipement culturel ou d’événement culturel.
À ce titre ne pas avoir un « lieu dédié » peut représenter un atout, faciliter la rencontre et « faire avec » les autres plutôt que de faire « à la place de ». Il y a des choses en train de se redessiner entre le monde politique et les associations, comme refondre les statuts pour des fonctionnements plus transversaux ou horizontaux pour sortir des schémas pyramidaux.
Cela renvoie à la question de « comment faire adhérer la population locale ? ». Ils’agit de réfléchir autrement qu’en termes de « public » déjà sensibilisé aux spectacles artistiques, mais plutôt en termes d’habitants locaux.
L’association joue alors un rôle de tiers, d’interface. C’est aussi une manière de construire une nouvelle histoire de la localité. L’association devient un acteur politique central, avec des possibilités, des marges de manœuvre. C’est une manière de combler l’écart entre l’activité associative et les habitants d’un territoire, quand d’autres logiques sont plutôt dans une ingénierie de projet sur le territoire.
Les envies d’hybridations des cultures, de « transdisciplinarités » des arts sont une manière de faire lien, rencontre.Il s’agit finalement d’une forme de définition de la culture populaire, qui part de l’activité des gens là où ils sont. Comment mettre au centre cette approche culturelle là, alors que nous vivons dans une société qui pense sa culture par le haut, tout autant que son aménagement du territoire ?
Cependant, la mobilité reste une grosse problématique pour les territoires ruraux à travers les questions de relations sociales et d’écologique qu’elle soulève.
Quand on est dans une association sans salarié avec des limites en termes de temps ne serait-ce pour se voir et gérer le minimum, faut-il franchir le cap du salariat ? L’association a décidé de rester bénévole, car avoir un salarié « demande du monde derrière » pour assurer les dossiers. Le salariat c’est aussi prendre le risque de perdre l’éthique du bénévolat et l’habitude de faire par soi-même. C’est donc risquer de se reposer sur un salarié qui décide finalement de tout.
Cela renvoie aux critères de « professionnalité ». La professionnalisation semble être gage de sérieux, de technicité, de savoir-faire, de fiabilité en opposition à « l’amateurisme ». Comment valoriser et légitimer une autre forme d’activité que l’activité dite professionnelle ? N’existe-t-il pas une sorte de professionnalité ou de métier de bénévole avec sa technicité, sa culture, son éthique, son organisation ? Comment se sentir légitime dans sa propre capacité à s’expertiser, à produire un savoir qui part des pratiques populaires dites « amateures »? Par exemple, la débrouille ne veut pas forcément dire médiocrité. C’est aussi une façon d’inventer d’autres professionnalités, d’autres rapports au travail, à l’économie, à l’argent…
Pensons également à « l’économie du commun » qui tient à la capacité de nommer et de valoriser des ressources intermédiaires partagées et « gratuites » pour le groupe, comme la réparation, l’entretien ou les déplacements personnels.
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