La Roulotte

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

La Roulotte a été créée en 2005. Le but de l’association est d’amener le jeu vers les gens, notamment dans les zones rurales du Limousin. Nous voudrions répondre à ce besoin sur le territoire. Nous sommes cinq au bureau. C’est un bureau-CA. Nous travaillons sur tout le Limousin.

Nous organisons des animations régulières dans les écoles, des ludothèques éphémères, des ludothèques séniors en EHPAD, des soirées jeux. Nous travaillons donc auprès de différents publics, les personnes handicapées, la petite enfance. Nous réalisation d’autres animations ponctuelles tout public lors de fêtes, sur les marchés, chez les particuliers.

Intervenir pour les privés n’est pas vraiment la vocation de l’association, mais sans ces actions ponctuelles qui représentent beaucoup d’entrées d’argent, nous serions en difficulté. Il nous faudrait plus de subventions, pour suivre notre but premier d’éducation populaire. Nous avons de la chance que le bouche-à-oreille continue, ca nous permet de trouver des prestations et de toujours fonctionner à deux. Car il n’y a qu’un salaire aidé sur les deux contrats, c’est un emploi associatif Régional, qui s’arrêtera en 2020. La fin des emplois aidés nous met en difficulté. Tout le reste est autofinancé par de la vente de prestations auprès d’entreprises privées. Aujourd’hui notre fibre de bénévole en prend un coup quand on parle de rentabilité. Il est dommage que ce genre d’association soit soumis à cette exigence.

Le jeu accessible à tous et gratuitement fait partie de nos valeurs. Nous refusons les animations quand l’entrée est payante pour les participants (mais nos prestations peuvent être payantes pour les organisations).

A St Junien la CAF finance un contrat Enfance-Jeunesse dont nous faisons partie, ainsi nos animations sont gratuites sur la commune car nous sommes financés. Nous avons une relation partenariale avec la commune, nous sommes acteurs de la vie associative ici. Nous intervenons dans les quartiers, nous participons également à un programme de Soutien à la Fonction Parentale (sans subvention).

Ces interventions avec une vocation sociale sont basées sur le jeu pour tous, par tous et en tout lieu. Tout le monde a droit au jeu et c’est notre outil de base. Nous souhaitons proposer des jeux intéressants, coopératifs, avec des éditeurs indépendants. Nous le faisons avec le jeu de société en montrant des choses différentes, et nous avons une réflexion pour faire de même avec le jeu vidéo. L’animation et le côté éducatif autour du jeu son très importants. Par exemple, nous ne mettons pas les règles du jeu sur la table. Pour nous, « laisser libre », c’est fondamental. C’est pour ça que nous faisons la distinction entre atelier et jeu libre. En atelier, nous intervenons sur des problématiques, nous recherchons des choses précises, nous sommes liés à des objectifs éducatifs. Mais n’importe quel jeu est éducatif, il y a une dimension sociale dans tous les jeux. On peut apprendre à compter, à lire, à construire des stratégies, etc.

Quand les enfants jouent, les parents discutent. La ludothèque devient un espace de liberté, de parole et de discussion. C’est un lieu d’échange et un lieu neutre où peuvent se rencontrer et interagir différentes professions et statuts sociaux.

Il s’agit de faire sortir les enfants et les parents de chez eux et de leurs écrans, et de leur proposer quelque chose à partir de leurs savoir-faire et compétences. Cela permet de sortir du quartier, de se mélanger, et de gommer les catégories sociales. Ces gens se retrouvent ensemble à jouer, alors qu’ils ne seraient pas adressés la parole dans la rue. La fête du village crée la même chose au milieu de la place. Nos usagers savent qu’on leur apporte quelque chose avec le jeu donc ils sont contents de faire un échange de bons procédés. Par exemple, nous voulions monter un jeu en tissu avec l’équipe, mais nous ne savions pas coudre, donc nous sommes allés voir les habitants qui avaient les compétences, et nous avons fabriqué le jeu ensemble. Ca a bien marché. Mais ca s’est fait en grande partie sur du temps bénévole. Ne pas avoir de subvention nous bloque pour sortir du coté vente de service, c’est pourtant la dimension d’éducation populaire qui nous intéresse, « faire avec les gens ». Or nous avons cette volonté d’entrer en relation avec les habitants, de créer un espace où l’on se sent libre de discuter et de faire une place au bénévolat.

Problématiques

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

La pratique de recherche de subventions et de prestations d’animation vient heurter le métier et les valeurs de l’association, notamment quand elle ne pense plus l’action en termes de public, mais d’argent. La nécessité de subsister en tant qu’association entre en contradiction avec ses valeurs d’accessibilité et de gratuité du jeu, d’échange et de bénévolat, de fournitures locales, d’ouverture et d’accueil dans les espaces qu’elle propose au public.

La tension entre la dynamique associative d’éducation populaire et la logique entrepreneuriale grandit à mesure que les fonds publics diminuent. De manière corrélative, les pratiques d’animation s’inscrivant dans une temporalité longue sont contraintes par les conditions à courts termes imposées par les commandes publiques ou privées et les appels à projets.

La normalisation de l’appel à projet amène les associations à être considérées comme de vulgaires prestataires de services subventionnés au « coup par coup ». Comment mettre en place une stratégie qui permettrait de répondre aux appels tout en « faisant à sa sauce, en créant quelque chose de particulier » ?

Ne faut-il pas repenser la notion même de projet si l’on veut repenser le modèle économique ? Autrement dit, penser un projet qui ne soit pas uniquement orienté dans une logique d’activité sectorielle, mais qui puisse en même temps penser le cadre et les rapports sociaux dans lequel il s’insère. Cela demande donc de passer d’une ingénierie de projet type « appels à projets normatifs » à une logique de projet consenti. Ce serait une manière de générer soi-même (et à plusieurs) ses propres appels à projets, avec leur temporalité propre.

L’association souhaite faire évoluer son modèle, pour cela, la formation autour du jeu est une perspective qui permettrait de conjuguer ses spécificités et valeurs, avec les ressources financières. Mais à cet endroit l’association est confrontée à une dichotomie privé / public : soit elle dispense des formations dans le privé et fait payer, soit, elle forme les agents du service public et doit à ce moment là travailler gratuitement ou pour des sommes symboliques, sans pour autant avoir davantage de subventions par ailleurs. Cette situation est symptomatique de l’impasse dans laquelle les associations sont poussées, prises en tenaille entre un marché concurrentiel où l’éducation populaire n’a pas sa place, et un service public qui n’est plus en mesure de financer le travail associatif.

Peut-être faut-il porter ces réflexions et ces idées d’évolution au sein d’un collectif d’associations, d’un réseau (mutualisation de compétences et de moyens). Comment mettre en chantier collectif ces interrogations, à la fois pour mieux comprendre les phénomènes qui touchent les associations et à la fois pour trouver des solutions « tierces » (au-delà du public et du privé soumis aux mêmes contraintes gestionnaires) à plusieurs et ainsi faire du commun ?

En quoi le territoire peut apporter une dimension tierce et sous quelle forme ? Quels seraient les partenaires et les acteurs susceptibles de se mobiliser dans ce tiers espace économique ? Comment penser une relation en réseau avec d’autres associations (du territoire proche ou plus lointain, du secteur de l’animation ou d’un autre) ? À quelle échelle ouvrir cette réflexion dans l’association et sur son environnement humain (salariés, bureau, CA, bénévole…) ? Comment trouver les moyens, en interne, pour penser l’environnement, plutôt que de se faire penser, manager, écrire, déterminer par lui ?

Il y a en cela une relation entre le modèle économique et la dimension « sociale » du jeu. Le jeu peut aussi se comprendre comme un tiers espace « neutre », de « liberté de parole », de « discussion », de « rencontre » entre métiers différents, de mixité sociale puisqu’il permet de croiser une diversité au-delà des catégories d’appartenance socioculturelles.

Le jeu pourrait appuyer une formation-action et une autoformation réciproque. Le jeu peut accompagner une logique réflexive d’ouverture d’espace où l’on peut faire un pas de côté, interroger sa posture socioprofessionnelle et son mode d’application militant.

Contact

2 Place Auguste Roche – 87200 Saint-Junien

OCCE 19

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

L’OCCE 19 est une association autonome, rattachée à sa fédération nationale, elle fait vivre un programme d’animation, de formation et d’intervention autour d’approches pédagogiques complémentaires à celle de l’Education Nationale.

Tous les premiers mercredis du mois, l’Occe organise des temps d’échange de pratiques entre enseignants, qui cherchent d’autres façons d’enseigner. Il y a un vrai échange professionnel. Le partage, les valeurs communes, les rencontres, la façon de travailler ensemble, d’être à l’autre. Ce qui permet d’interroger les pédagogies institutionnelles et coopératives.

L’OCCE organise ses rencontres dans des lieux peu habituels, car être hors cadre institutionnel ou structuré permet de faciliter l’échange. Nous avons besoin de cette liberté-là, de déborder du cadre.

Autour des pédagogies institutionnelles et coopératives il y a des enseignants, mais également des animateurs, des éducateurs, des citoyens qui se questionnent. Il y a donc des statuts différents dans l’association, ce qui rend l’OCCE complètement protéiforme.

L’association dialogue avec l’institution mais contrairement à l’Education Nationale l’OCCE permet de faire un pas de côté, « hors cadre ». C’est une manière d’être à la fois « huile et grain de sable dans l’engrenage ».
Nous sommes à la croisée de différents mouvements pédagogiques.

Certains ont une accointance avec Freinet, nous nous situons plus généralement dans le mouvement de la pédagogie alternative sans nous référer à un « maître à penser » unique. Nous cherchons ainsi à mettre en valeur la « matière grise » en dehors des logiques de formatage, car le système de formation des enseignants est trop restrictif. Puis dans ce système éducatif, tout pousse à l’individualité, alors qu’on sait que l’enfant apprend mieux avec des pairs.

La pérennité des fonds est un problème, c’est compliqué, car nous ne somme pas une entreprise avec telle ou telle ressource. Or l’Education Nationale à une commande de rentabilité vis-à-vis de ses enseignants, c’est le modèle entrepreneurial qu’elle tente d’appliquer et notre système éducatif est empêtré là-dedans.

Les salariés sont nécessaires pour l’activité que nous voulons développer. Mais nous ne savons pas sir nous aurons les financements à la hauteur. Nous aimerions trouver un équilibre entre les activités et les personnes qui peuvent les assurer.

Toutes les associations départementales ont une autonomie. Nous ne proposons pas toutes les mêmes choses, les mêmes ateliers, les mêmes interventions. Mais nous ne faisons rien isolément, nous travaillons avec d’autres associations et partenaires.

Le CA est variable, avec une dizaine de personnes. Ce sont des gens actifs, donc en poste (ailleurs ce n’est pas toujours comme ça, il y a des retraités). Le CA est ouvert et mouvant. A côté du CA il y a une union régionale avec deux représentants de chaque département. Et la fédération encore au-dessus.

Problématisation

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

L’OCCE offre un tiers espace entre la sphère privée et la sphère publique, l’investissement personnel et professionnel. Cet espace à la fois connecté au travail et séparé du travail favorise une démarche réflexive non contrainte et un processus d’auto-formation réciproque. Faire un « pas de coté » vis-à-vis d’une posture d’agent, « déborder du cadre » pour réfléchir à sa condition d’acteur et d’auteur, de co-constructeurs de situations collectives. Il y aurait dans ce sens une écriture intéressante à produire autour de cette expérience collective pour qu’elle serve de référentiel à d’autres structures au-delà du champ pédagogique.

Autrement dit, comment sortir des logiques disciplinaires propres au fonctionnement sectoriel et institutionnel pour engager des espaces d’échanges transdisciplinaires ? Par exemple comment provoquer un croisement des savoirs et penser au-delà du rapport d’enseignement. Comment les pratiques « protéiformes » de l’association viennent bousculer les grilles des métiers classiques ? Est-ce qu’il n’y a pas là une expérience qui repense les statuts, fonctions et organigrammes professionnels ?

Comment penser autrement l’articulation entre le modèle éducatif et le modèle économique ? Cela demande de créer les conditions d’extériorité depuis l’intérieur de l’association, incorporer dans l’asso une capacité à se questionner, à prendre du recul, à distancier son activité.

Dans le constat du conflit entre les valeurs de projets associatifs et les contraintes économiques, remarquons que le modèle entrepreneurial gagne aussi le milieu de l’enseignement. Il faut prouver aux pouvoirs publics qu’il y a des retombées économiques et l’Education Nationale à une commande de rentabilité vis-à-vis de ses enseignants. Comment trouver un mode de fonctionnement qui réinscrit le temps dans une durée, c’est-à-dire pas uniquement la temporalité du projet et de l’efficacité, mais celle du processus réflexif, de la transformation, de l’auto-formation ? L’ouverture de tiers-espaces en est un exemple.

L’OCCE est au cœur d’une tension entre l’institué (ce qui est en place, l’ordre établi) et l’instituant (ce qui émerge, qui s’auto-constitue, parfois contre l’institué, dans l’institué ou autour de lui). L’histoire institutionnelle montre comment les pratiques instituantes deviennent elle-mêmes institution. L’institution des pratiques pédagogiques alternatives ou coopératives est-elle souhaitable ? Souhaite-t-on une généralisation des ces pratiques ? Est-ce qu’il est souhaitable de les faire entrer dans le « cadre » ? Ou au contraire, doivent-elles rester instituantes, autrement dit, subversives et « hors cadres »?

Contact

7 Ter Rue Louisa Paulin – 19000 Tulle

MJC Centre Social La Souterraine

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

L’association a été déclarée en octobre 1964. Nous avons, entre autres, une mission sur l’éducation artistique et culturelle. Nous utilisons la culture pour travailler sur des problématiques transversales comme la santé. L’animation socioculturelle est notre cœur de métier avec, en plus, la spécificité de la gestion du cinéma. C’est important pour le territoire et pour le dispositif d’éducation socioculturelle. Tout en conservant notre cœur de métier, on s’est orienté vers le FSE. Autour de la question de l’illettrisme. Nous avons un personnel convaincu que la culture est un média facilitateur de socialisation. Nous relions éducation populaire et éducation artistique

Les activités de notre structure correspondent bien à nos besoins de territoire. Il y a des équipements importants, un centre culturel avec une capacité de 400 personnes en jauge assise. C’est la seule MJC du Limousin et le fait qu’elle soit centre social pour tout public, de l’enfance jusqu’aux personnes âgées qui font de l’aquagym, fait qu’on touche l’ensemble de la population. On a des services dédiés sur chaque population : un projet d’insertion sociale, le cinéma, outil culturel, un contrat éducation artistique… Donc on peut mutualiser ces projets en interne. C’est mieux que si on avait des services éclatés à mettre en réseau.

Nous travaillons sur la commune sur le projet « micro folie », en partenariat avec la Villette. C’est un musée numérique qui permet d’avoir accès à des œuvres picturales et musicales, c’est pluridisciplinaire. Mais c’est aussi un outil d’éducation artistique qui permet à n’importe quel éducateur (éducation nationale ou autre) de faire un parcours de recherche autour des œuvres.

Problématisation

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

Le territoire de la Creuse a été impacté économiquement par l’industrie automobile, notamment GMS. La crise de ce secteur implique des licenciements de gens qui habitent sur le territoire. Cette situation pèse sur l’action de la MJC, car les familles s’en vont et il y a moins de jeunes. D’un autre côté, il y a un passé mutualiste encore prégnant et une solidarité entre les gens. Un mouvement coopératif très fort a perduré dans l’histoire, donc le territoire est marqué par les valeurs de solidarité et d’entraide… Le cercle Condorcet en Creuse est assez actif et il y a beaucoup d’économie solidaire à Guéret.

La conscience d’être un territoire délaissé ou en retrait permet-elle d’imaginer d’autres formes de développement, notamment des expérimentations d’activité et d’économie commune ? Or, la professionnalisation conduit souvent à des recherches de financement dans une logique d’appel à projets alors que le besoin concerne l’appui structurel du fonctionnement.

Le centre culturel est intercommunal, mais la communauté de commune n’a pas la compétence culturelle, simplement la compétence « équipement structurant pour le territoire ». En quoi le travail de la culture, au-delà de la mission historique de l’éducation populaire et des MJC, peut-il contribuer à nourrir un développement culturel, notamment dans une cohérence avec les différents acteurs du territoire ?

L’animation est par définition très large et polyvalente. Le personnel a une vision de l’ensemble des projets, ce qui permet de mutualiser des secteurs et de construire ensemble  pour faire en sorte que les publics se croisent. En quoi cette logique trans-sectorielle propre au lieu peut-elle inspirer, voir servir d’interface, dans un développement local ? On revient à la dimension du territoire apprenant dans le sens générique de tiers espaces au-delà du label « tiers lieux ».

Comment mutualiser des savoirs, des pratiques, des stratégies avec d’autres acteurs et/ou habitants du territoire pour que l’économie ne soit plus uniquement cette contrainte aléatoire et incontrôlable, mais un élément sur lequel jouer, avoir prise, à l’échelle d’un territoire de vie ?

Contact

27, rue de Lavaud – 23300 La Souterraine

Clé de Contacts

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

Nous sommes un centre d’animation de la vie locale. Notre public c’est tout le monde, nous ne nous attachons pas au revenu, à l’origine sociale, culturelle ou géographique. Nous ouvrons au maximum les portes pour que le volume du public soit important. Ce sont les rencontres avec de nouveaux publics qui amènent de nouvelles idées et c’est cela qui nous font avancer. Si nous étions restés sur notre public historique, nous n’aurions pas autant de nouveaux projets, ce ne serait pas suffisant.

Nous accueillons les permanences de la CAF, CARSAT, Que Choisir, un conciliateur de justice, un défenseur des droits et la maison des adolescents qui font des rendez-vous psy avec des ados d’Aubusson. Nous gérons aussi l’accueil de loisir extra-scolaire. Nous n’avons pas une Délégation de Service Public générale, mais une délégation de service sur l’accueil de loisir

Nous travaillons beaucoup avec les associations locales, le club de canoë-kayak et le club de pêche, la ressourcerie à Felletin, nous faisons des interventions dans le cadre du Réseau REAAP , des événements, des accompagnements… On a créé un emploi mutualisé avec le club de rugby et financé par la région Limousin.

Des jeunes passent par l’accueil de loisir et on les revoit ensuite, ils finissent parfois animateurs Bafa, ou sont employés directement sur l’accueil de loisirs. Donc nos collègues de travail sont des jeunes qui ont choisi ce territoire, d’y vivre et d’y travailler. Ils sont attachés à l’association et à leur boulot. Puis ils sont impliqués sur le territoire, au-delà de notre propre association.

Nous faisons partie du réseau ALISO (réseau creusois des acteurs du lien social) c’est une association départementale qui regroupe les EVS, les centres sociaux et d’autres adhérents.

Problématisation

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

Souvent les réseaux territoriaux inter-structures comme lieux ressources sont plus actifs que les réseaux sectoriels verticaux. Alors que les collectivités territoriales ont du mal à se prononcer sur un projet de territoire, cela peut être le rôle d’un centre social de favoriser un conseil de développement local et populaire (ou « citoyen »). À quoi correspond la territorialité ? Selon quelle vision globale ? Alors que le territoire est déchiré par les problèmes socio-économiques, problèmes qui traversent également les associations, qu’est-ce qui construit socialement le territoire en terme de pratiques, d’activités, d’expériences, de liens ? Dans ces conditions comment peut se recomposer une cohérence territoriale ? Cela renvoie également à la question des compétences collectives, comment elle se forment, comment elles sont reconnues et validées dans le cadre des politiques publiques. Autrement dit, les animateurs et les éducateurs ainsi que les militants et bénévoles ne sont pas de simples techniciens dégageant une prestation ou une mission, mais également des producteurs de savoir à partir d’une pratique.

Si tout le monde reconnaît le caractère normatif, répétitif, épuisant des appels à projets, comment articuler les financements dans une autre logique de développement territorial ? Le paradoxe est d’être pris par ces logiques de demande de financement propre aux conditions associatives actuelles tout en étant considéré par les habitants et les bénéficiaires comme un service public du territoire. Cette contradiction est aussi liée à l’exigence paradoxale des personnes qui s’installent sur le territoire, dans une petite ville, tout en attendant les services d’une grande agglomération. Cela pose la question de l’implication des personnes dans un lieu d’activité, du rapport de celui-ci avec le territoire et d’une organisation à trouver autour du « commun » entre des services publics et des services privés.

Une telle organisation commune passe par l’ouverture d’espaces où il est possible de penser, de définir et d’expérimenter ensemble ce commun. Les « modes de gouvernances » ou, pour le dire de manière plus proche des pratiques, les modalités de prise de décisions, les rapports au pouvoir, l’organisation et la définition des rôles autour du bien commun, pourraient découler de ces espaces réflexifs.

Ces espaces territoriaux et communs peuvent également se décliner plus à l’intérieur des structures, notamment au sein de Clé de Contacts où se pose la question du rapport à l’activité, au temps de travail, à l’organisation et la coordination des différents métiers. L’expression d’une forme de débordement de l’activité, de « tout-azimuts », de manque de temps et de dispersion au sein de l’association, pourrait se mettre au travail, dans un rapport au temps plus long et au tempo moins intense, dans de tels espaces réflexifs « internes ». Tout en avançant sur des solutions économiques, partenariales et territoriales, à ce qui pressurise de l’extérieur, dans des espaces de réflexions communs sur le territoire, plus « externes » à l’association.

Contact

10 avenue de la République – 23200 Aubusson

CEMEA

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

Nous fêtons les 50 ans d’existence des CEMEA en 2016 sur le Limousin.

Nous sommes une association d’éducation populaire, mouvement d’éducation nouvelle, complémentaire de l’enseignement public, dans son intitulé même, nous défendons l’éducation pour tous. L’enjeu, c’est de faire bouger ses lignes de l’éducation, même au sein de l’Education Nationale, notamment par la proposition de formations, mais nous nous heurtons parfois au cloisonnement des contraintes de l’institution. C’est un beau défi.

Nous sommes quatre permanents sur l’équipe limousine, une secrétaire qui s’occupe de l’administration et trois personnes sur les actions pédagogiques. Nous avons tous les trois des missions autour de la «vie du mouvement », ce sont des temps de regroupement, avec les militants, des soirées jeux, des débats, etc. Les formations sont aussi portées par les bénévoles, il n’y a pas toujours d’encadrement salarié.

Parfois des salariés sont amenés à dépasser leur temps professionnel pour se consacrer à la vie associative. Cette question du rapport entre bénévoles et salariés est une préoccupation permanente chez nous,c’est une frontière souple propre au fonctionnement associatif mais qui peut poser des problèmes dans le rapport au travail.

Nous avons un projet autour de l’éducation nouvelle et des mouvements d’éducation nouvelle. C’est un projet de construction citoyenne et de changement de société. Pour cela, la formation est un outil principal. Elle est à destination aux adultes du champ éducatif. Nous faisons autant de la formation pour les volontaires que de la formation professionnelle, dans l’animation, avec le personnel de l’Éducation Nationale, de la petite enfance, et du secteur culturel (accompagnement à la médiation culturelle)…

Nous avons également plusieurs projets spécifiques d’accompagnement. On a un animateur qui s’occupe des conseils citoyens des quartiers de la ville de Limoges dans le cadre du contrat de ville. La CAF nous a également missionnés pour animer l’ensemble du réseau des assistantes maternelles (RAM) du 87. En lien avec la DDCSPP 87, nous participons à des journées d’échanges de pratiques avec les professionnels (avec la ligue de l’enseignement, les Francas…) nous nous regroupons pour parler de nos spécificités autour de l’éducation populaire.

 Nous avons aussiun groupe de militants investis sur la Creuse autour des questions de l’école. Ils mettent place des temps d’échanges et de débat sur ces questions.

Nous cherchons une cohérence politique au sein du réseau CEMEA. L’association nationale sert de relais au niveau des ministères. C’est aussi une coordination nationale de la vie militante, avec des propositions et des formations. Il y a des commissions nationales sur différents pôles, pour échanger entre ce qu’il se passe sur le terrain dans les associations et avoir une politique cohérente sur tous les territoires

Notre volonté, dans la construction actuelle sur la grande région, était de partir du territoire pour qu’il y ait une dynamique locale, avec un représentant de chacun des territoires. Nous voulons rester très ancrés pour éviter une centralisation des compétences.

Il y a de nouvelles solidarités qui naissent, notamment en Creuse, il y a peu de moyens mais il y a beaucoup de réseaux, de collectif,d’entraides, pour remédier à ce manque-là sur le territoire. Nous travaillons beaucoup sur les partenariats, sur les formations, sur l’école du numérique…. Nous faisons de la mutualisation de connaissances, d’outils et de matériel.

Par exemple, le fait d’avoir en charge les conseils citoyens, permet de rencontrer les autres associations de quartier et de paraître en plus grande visibilité sur le territoire. C’est comme cela qu’on nous interpelle pour de nouveaux projets, que l’on peut répondre davantage aux besoins du territoire et pas seulement à nos besoins à nous. C’est parce que nous sommes sorti de nos champs historiques, que nous avons été repérés et que la porte s’est ouverte. Ça nous amène plutôt à réfléchir sur nos modèles.

Si des tiers lieux naissent et répondent à un besoin, à nous de nous poser des questions, notamment sur les attentes de proximité de la vie locale où les gens ont besoin de se rencontrer dans un espace qui leur appartienne, un espace en partage. Les gens ont besoin de s’approprier des espaces communs.

C’est très fort au sein de notre association CEMEA Limousin, cette idée que ce ne soit pas l’économie qui nous gouverne. Car on est attaché à nos valeurs et nous ne voulons pas faire « pour » l’économie, ou mettre l’économie en premier. Sur les modèles socio-économiques,on se questionne déjà entre nous aux Cemea. Et c’est intéressant de voir que d’autres secteurs sont traversés par les mêmes problématiques. Nous voulons avancer sur notre projet, mais ne pas passer à côté de ce qui peut naître autour.

Problématiques

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

Les appels à projet changent-ils le rapport entre service public et privé ?Cette logique prestataire de l’association était-elle déjà inscrite avant ? Et dans ce cas, de quoi les AAP sont-ils révélateurs ?

La principale ressource des associations que sont les bénévoles se « tarie ». Mais s’agit-il de la fin de la militance ou d’un déplacement des ressources vers un autre type « économie du commun » par exemple ? Dans ce cas, plutôt de déplorer « la fin de.. » ne faut-il pas chercher ailleurs des modèles ou d’autres configurations systémiques ?

Est-ce que dans son cas, le renforcement du salariat ne vient pas combler ce déficit bénévole au risque d’épuiser les salariés, qui passent énormément de temps dans l’association ? Ils ne savent plus quand ils sont salariés ou bénévoles et c’est parfois contraire à ce qui est défendu dans le projet de l’éducation populaire,notamment sur le rapport au travail. Est-ce qu’il s’agit simplement de questionner le rapport entre CA et salariat sans s’interroger sur la question du modèle économique ?Autrement dit, est-ce que l’association peut changer à l’intérieur alors que le contexte extérieur évolue vers une autre direction concernant l’économie de l’engagement de la relation ?

Comment toucher un nouveau profil d’acteurs si les associations ont du mal à se distinguer dans leur proposition ou apparaître clairement en termes de visibilité sur le territoire ? Cela pose la question de l’accessibilité à travers des espaces de rencontres, d’échanges,de constructions et de propositions. Devons-nous continuer à réfléchir en termes de dispositifs ou plutôt ne faut-il pas redéfinir nos propositions en termes d’espaces ?

En revanche, les partenariats restent une ressource classique des associations. Ce partenariat reste-t-il celui classique du secteur de l’éducation populaire, ou se renouvelle-t-il avec un nouveau profil socioprofessionnel d’acteur ? Si oui est-ce que ces compétences sont liées uniquement à des corps de métier ou sont-elles de plus en plus détachées pour se mobiliser plutôt sur des formes situationnelles ?

La grande région Nouvelle Aquitaine est l’occasion d’interroger le rapport du« local au global » en termes de réseau, de développement de territoire, d’économie d’échelle, d’espace de diffusion d’expérimentations. Quelle est la bonne dimension ?L’extension du territoire augmente les temps de transport, les temps de réunions croisées, aplanie ou au contraire mais en tension la diversité associative.

D’un autre côté le renforcement d’un réseau sectoriel peut constituer une nouvelle ressource, mais alors, n’est-ce pas au détriment de l’appropriation locale des processus par les acteurs/habitants ?Le renouvellement du mode d’organisation ne serait-il pas en train de se faire davantage par la dimension territoriale, dans une logique de rhizome, que par la fédération sectorielle et ses structures gouvernées par une logique de projets ?

L’organisation en réunions à la chaîne (internes ou partenariales) qui peut devenir une réunionnite est assez symptomatique du fonctionnement associatif qui se rapproche d’une logique identitaire de secteur mais qui ne permet pas obligatoirement de se poser en extériorité par rapport à son fonctionnement et trouver des alternatives.

Où sont alors les espaces possibles de redéfinition qui ne seraient pas simplement utiles pour le renouvellement du projet associatif, mais qui seraient aussi des espaces réflexifs permanents pour penser les extériorités(contraintes politiques, économiques, environnementales) et avoir prise sur elles? Ce serait d’ailleurs conforme à la vocation transformatrice de l’éducation populaire. Mais est-ce que cette« pensée en actes » se déploie dans les lieux classiques de rencontre des réseaux d’éducation populaire, ou faut-il imaginer d’autres espaces ?

Cela renvoie la possibilité d’être attentif sur ce qui se passe dans le territoire, de se laisser envahir son observatoire par les alternatives qui naissent autour, tout en échappant aux radars institutionnels des logiques d’appels à projets ou de dispositifs.Cela veut dire que les intervenants salariés aux bénévoles doivent concevoir leur approche aussi en termes d’espace (donc d’ouverture,de passage, de trans sectoriel…)

Effectivement, où sont les espaces de rencontres d’une diversité sociologique dans un accueil inconditionnel qui permettrait ainsi de faire écosystème et de se sentir dans un espace du commun ?

Il s’agit de réinventer ces lieux de convivialité et de proximité de type café associatif sans obligatoirement entrer dans une logique de « tiers lieux », de prestataire de service et de « pépinière de projets » qui ne changent rien à la logique individualiste productiviste de l’économie libérale.

Contact

23A boulevard Saint Maurice – 87000 Limoges

BEAUB FM

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

Beaub FM a 30 ans d’existence, 30 ou 40 personnes actives (avec des émissions à l’antenne), il y a sept personnes au CA et cinq salariés en emploi aidé confrontés à la précarité. La professionnalisation est une composante de la reconnaissance de notre métier, mais l’engagement professionnel comme la participation au CA sont intimement liés au projet et à la gouvernance de l’association. Cela passe par une certaine sensibilité culturelle,sociale et politique partagée.

Par exemple, nous avons fait des émissions sur les quartiers avec les habitants. Nous accueillons des groupes de musiques peu ou pas diffusés. Nous sommes au 9e étage dans un quartier prioritaire…Mais en même temps nous avons un lien avec tout le monde, car nous sommes une radio ouverte et tout le monde passe par nous pour parler de ce qu’il fait.

Comment permettre aux gens du milieu rural de venir à Limoges et inversement ? Par exemple nous envoyons souvent nos salariés vers le plateau de Millevaches, se former à Pivoine notamment. Il faudrait que ça aille dans les deux sens, que les gens puissent venir ici.

90 % des programmes sont réalisés par les bénévoles ou salariés au sein de la radio. Nous faisons partie de la Ferarock, ça nous permet d’avoir une représentation au niveau national (auprèsdu ministère de la Culture, des syndicats de radio, de la fédélima,du FSER, du CSA, de la Sacem, on a des représentations dans toutesces instances grâce à la Ferarock). On fait partie de 2 syndicats de radio, du syndicat des musiques actuelles, et on est au CA du RIM.

Pour maintenir ce salariat, nous faisons des prestations privées, nous répondons à des appels à projets. Notamment le FSER, qui est le fond de soutien à l’expression radiophonique. Nous avons peu de subventions locales. Cela permet une liberté d’expression des médias associatifs et avoir d’autres médias que le mainstream et donc d’autres contenus. Le FSER est sur 3 axes qui nous obligent à nous engager, et ce n’est pas si mal pour ça :

  • Action culturelle et éducative
  • Action en faveur del’intégration et lutte contre les discriminations
  • Action en faveur du développement local et l’environnement

À force de rencontrer du monde ici, nous voyons bien qu’il y a besoin d’un lieu pour se croiser et pour que les gens communiquent.Il nous faudrait un lieu de vie.
Avec des énergies différentes au même endroit, pas qu’une mutualisation de compétences, mais un lieu de vie, des échanges techniques, de pratiques.
Ce genre de lieu, plein de gens l’aimeraient, mais il n’y a pas encore d’initiative dans ce sens ; il y a un disquaire associatif, des programmateurs ou des assos sans bureau qui pourraient se rencontrer,faire du lien. Il y a une possibilité avec le contrat de filière spécifique aux MA d’avoir des aides pour faire une expérimentation et un test de la faisabilité d’un projet.

Problématisation

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

Comment ne pas être régi uniquement par des préoccupations économiques, entre le projet associatif et le maintien de salariat ?

Quel équilibre entre précarité subie et précarité choisie ?Comment évaluer des actions qui ne se résument pas uniquement à des prestations de services, mais ouvrent un espace de croisement et d’échanges ?

La professionnalisation pousse à reproduire une technicité alors que l’engagement associatif pousse à se renouveler. Comment mutualiser ces pistes d’autonomie ? Comment se former à l’auto-missionnement ? (choisir les activités / actions qui nous semblent pertinentes, plutôt que de répondre aux opportunitésproposées sans cesse par l’extérieur).

La question de la transmission est récurrente dans le milieu associatif et peut prendre plusieurs formes (formation,autoformation, expérimentation, etc.): comment passer le flambeau entre une première génération militante et nouvelle génération dont le mode d’organisation n’est pas tout à fait le même,notamment dans le rapport entre l’engagement personnel et collectif ? Comment, d’une manière générale, entrer en réflexion sur ce qui fait collectif aujourd’hui ?

La conscience d’être un acteur susceptible d’orienter le cours historique, de changer les pratiques ne peut se faire que dans une implication en situation. Les radios dites « libres » ont été historiquement des laboratoires sociaux de croisement des idées et des esthétiques. Elles peuvent continuer à jouer ce rôle sur les territoires, constituer de nouvelles centralités populaires.

Contact

4 allée Fabre d’Églantine – BP 2031 – 87070 LIMOGES Cedex
Site internet : http://beaubfm.org/


Le battement d’ailes

Présentation

Cette partie présentation est la synthèse d’un entretien réalisé entre l’équipe associative et le laboratoire de recherche (LISRA) le second semestre 2018.

Le Battement d’Ailes, dès 2005, s’est organisé autour de pratiques agro-écologiques. Il s’agit de mêler agronomie et écologie pour penser et mettre en œuvre les fondements d’une agriculture respectueuse de son milieu, permettant de se nourrir dans dégrader l’environnement.

L’association fonctionne en autogestion, ce qui détermine ses relations, ses modalités de travail et de prise de décision. Cela prend forme avec des délégations de pouvoir, des commissions animées par des coordinateurs entourés d’autres personnes pour avoir des marges de manœuvre. La collégiale (composée des amis du territoire) et les bénévoles en immersion sur le lieu, nous permettent d’avoir un regard extérieur sur l’activité de l’équipe permanente (constituée de bénévoles et de salariés).

Le lieu s’étend sur 5 hectares et mêle production agricole (fruitière, légumière, pâturage) habitat et activités d’accueil. Il se conçoit comme un tremplin à différentes initiatives partageant des valeurs communes, une autre façon de vivre l’environnement.

Nous voulions mettre en pratique l’agro-écologie puis la transmettre, plutôt que de rester dans un discours. C’est pour cela que le bâtiment principal a été conçu pour la restauration et l’hébergement, pour faire venir un public large et différent, dans une perspective de sensibilisation et de formation. Nous accueillons beaucoup de stages qui constituent un support pour étendre notre public et essaimer notre expérience. Mais faire uniquement fonctionner le restaurant et l’hébergement ne fait pas sens pour nous. Ce que nous aimons et savons faire, c’est accueillir des gens et faire avec eux. C’est pourquoi nous avons décidé pendant la trêve (temps de réflexion et de pause de l’activité pendant l’automne 2017) de mettre plus en avant l’essaimage. Aujourd’hui, relancer la formation et l’essaimage, qui sont le cœur du projet, demande du temps et de s’y consacrer pleinement.

Nous sommes inscrits dans plusieurs réseaux (réseaux RAE, Paysans Dès Demain, REPAS) qui permettent de prendre du recul, de rencontrer d’autres initiatives et d’accueillir des personnes qui veulent se former et tester leurs projets. En interne de l’association nous avons beaucoup de temps de réflexion autour de nos pratiques et de nos vécus (réunions d’équipe, entretiens individuels, séminaires, trêve…).

En ce moment (septembre 2018), l’équipe est réduite et il y a des changements réguliers depuis 3 ans, donc le but aujourd’hui est d’accueillir de nouvelles personnes afin de porter une équipe solide pour tenir le projet.

Problématique

Cette partie propose de faire émerger des problématiques transversales à partie de l’analyse de l’entretien par l’équipe de recherche en dialogue avec la démarche réflexive engagée par les acteurs associatifs.

Le Battement d’Ailes évoque la culture du jardin comme un espace d’expériences fortes liées à des individualités (ayant chacune leur vision, leur culture, leurs techniques propres) qui se succèdent sur le terrain sans produire nécessairement des objets, références ou savoirs communs et donc transmissibles. S’ajoute à cette complexité humaine une complexité technique puisque chaque espace de jardin a une histoire, une fonction et une destination différentes des autres. Comment se constitue un champ de savoirs communs sans pour autant raboter les aspérités que constituent les styles et cultures individuels ? Souvent dépendant d’une logique disciplinaire ou sectorielle de type universitaire (et que l’on peut retrouver dans le jardinage tout autant que dans la philosophie), un corpus de savoir est toujours lié à un rapport de pouvoir dans la capacité pour un groupe socioprofessionnel d’orienter un champ historique, en l’occurrence, ici, celui de l’agriculture et de l’écologie. La recherche-action peut trouver une place spécifique comme production de savoirs à partir des pratiques, en articulant le commun et le singulier, c’est-à-dire en prenant soin de la dimension organique des groupes.

Les savoirs-faires sont riches, mais font difficilement l’objet de transmissions centralisées dans un tronc commun. Comment mettre en valeur ce patrimoine commun alors que chacun développe sa propre vision, son propre parcours d’expérience ? Comment constituer l’héritage de connaissance des anciens pour ensuite le réinvestir dans des gammes de pratiques, de gestes, de valeurs et de connaissances à (auto) produire dans l’expérience vécue ? Autrement dit, comment maintenir l’entrelacement entre passé et présent, entre « anciens » et « nouveaux » ? Comment penser l’équilibre entre la transmission (qui peut-être lourde et contraignante d’histoire) et la liberté d’inventer (qui peut être nécessaire aux arrivants pour mieux sentir leur place et s’épanouir dans leur activité) ?

Comment ne pas tomber dans le travers de la référence aux anciens comme des « dogmes » de bonnes pratiques ? Comment laisser s’exprimer et reconnaitre les styles de chacun comme une richesse, comment se laisser le temps de l’enquête commune ?

Cela revient à poser la question de ce qui fait récit collectif et procure une vision globale entre les anciens et les nouveaux arrivants. Ce qui renvoie à l’ouverture d’un espace réflexif en définissant un espace tiers où l’on prend du temps et de la distance par rapport aux différentes formes d’engagement très prenantes, voire épuisantes.

L’association semble décrire impression de « courir tout le temps », de « ne pas faire les choses vraiment ». Plutôt que de « prendre le temps » ou « d’avoir du temps », comme si le temps n’était qu’une donnée quantitative. Alors, peut-être est-il nécessaire de penser le temps comme un espace dans lequel il ne pourrait pas être capté (par la logique productiviste, par l’urgence, par la gestion du quotidien…). Autrement dit, il s’agit d’ouvrir un espace « tiers », qui serait en dehors de l’activité quotidienne, qui consacrerait une place centrale à la posture d’extériorité par rapport à la structure. Ce serait l’occasion d’hybrider la démarche avec d’autres qui ne sont pas de la structure. Tant que la nature de ce « tiers espace réflexif » ne sera pas définie et repérée, il ne pourra acquérir une autonomie et se confondra surement avec l’espace socioprofessionnel, avec ce qu’il a d’enfermant, de gestionnaire et de technique.

Par exemple, l’association désire travailler sur ce qu’elle appelle sa posture « technico-politique », creuser davantage les significations pour chacun de l’autogestion et de l’agro-écologie, et évoquer les « tabous ». Or ce travail réflexif désiré aura certainement du mal à se réaliser s’il reste pris dans les murs des lieux et des cultures socioprofessionnelles. Comment provoquer un espace dédié à ces questions, avec d’autres sur le territoire, afin de déplacer et de destructurer les réflexions habituelles, pour se transformer au contact de formes étrangères ?

La sensation d’urgence est souvent liée à une projection, et donc une dépossession du présent au nom de l’avenir. L’urgence se fait toujours au détriment de la qualité de la présence. Du coup, il est difficile d’atteindre la démarche réflexive souhaitée, (mais aussi productive, qui « remet les mains dans la terre » et qui « fait sens ») si l’on reste dans la logique de projet en se demandant « à quoi ça sert », quel est le rapport « coût / efficacité », etc. L’urgence est souvent liée à un temps économique dont nous choisissons peu les règles, un temps agité, liée aux opportunités, cerné par la concurrence et la logique de survie. Comment habiter pleinement l’association et son territoire ? Comment opposer une présence à cette absence de nous-mêmes que la contrainte économique impose ? Comment, pour ce faire, trouver des points d’appuis extérieurs à l’association ? Le Battement d’Ailes a pris l’habitude de travailler en réseaux pour provoquer de l’extériorité et d’initier des temps de trêve et de séminaire pour entrer en réflexion sur son activité. Mais pour autant elle semble inquiétée sur son versant économique. Alors, comment déséconomiser son rapport à l’activité ? Est-ce que la mutualisation des ressources, à une échelle locale pour commencer, ne permettrait pas une relâche des tensions économiques tout autant que de nouveaux points d’ancrages, d’essaimage et d’appuis à porté de main ?

Dans cet essaimage par capillarité, comment en même temps former un corps de métier spécifique (l’agro-agriculture, la permaculture, la formation en éducation populaire, etc.) et changer de l’intérieur les corps de métier existant comme l’agriculture, l’aménagement du territoire et l’éducation ?

La relance de l’essaimage va-t-elle permettre un travail collectif pour « faire parler le métier » (entre anciens et nouveaux) afin de dégager ce qui fait commun, mais aussi de rendre visible et de poser les controverses?

Qu’est-ce qui structure (ou « forme » dans tous les ensembles du terme) un collectif ? Est-ce le projet ou le processus ? Les financements enferment les associations dans une logique de projet au point d’en perdre les fondements initiaux. La dissociation ensuite du projet et de la réalité écosystémique ou organique vivante provoque une tension, voire une fracture, dans le modèle de gouvernance, et finalement de l’épuisement par perte de sens. Le problème n’est peut-être pas le temps quantitatif ou le financement, mais la cohérence. Or cette cohérence est le fruit d’une rencontre entre le vécu de la pratique et la production individuelle et collective de savoirs, de connaissances, de valeurs, dans lesquels chacun se retrouve. La question autogestionnaire ne peut prendre corps que si une production de savoirs issue des pratiques interroge et réajuste continuellement le processus. Résister à la logique productiviste revient probablement à établir au sein même de la structure un « contre-espace » d’où la cohérence et le commun peuvent émerger.

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Site internet : https://lebattementdailes.org/