Manifeste
La recherche-action en laboratoire social tel qu’elle est instaurée par le LISRA depuis une quinzaine d’années correspond à des besoins urgents pour les populations de se saisir des outils de la recherche afin de développer ses propres expertises en réponse aux crises actuelles, d’inventer et d’expérimenter des formes d’organisation sociale respectueuses du vivant.
Le LISRA s’adresse en priorité aux acteurs populaires
et participe à l’émergence de centralités populaires, lieu de croisement
des savoirs (techniciens, scientifiques, pragmatiques), de formation réciproque
et d’expérimentation par la recherche-action.
Nous entendons par « populaire », cette prise de conscience d’être situé voire dominé dans un rapport social de production et reproduction et la possibilité d’en modifier l’orientation historique par la constitution de minorités actives. En cela cette dimension populaire se distingue d’une version chosifiée d’un « peuple », mais s’entend comme une construction sociale permanente de populations se recomposant et s’affirmant dans une dynamique de transformation sociale.
Acteur-chercheur n’est ni un statut ni une profession,
mais une démarche réflexive instruisant sa propre expérience comme matériaux
d’une production de savoir réinvestie dans sa pratique provoquant ainsi un
processus en spirale. Cette « recherche en acte » ou réflexivité
garantit la pertinence et l’efficience du savoir tout autant qu’une recherche
appliquée ou une recherche fondamentale.
Cependant, les conditions de production de savoir sont différentes, car elle nécessite dans ses situations d’implication socioprofessionnelle la négociation d’un « tiers espace » réflexif. Cela conduit à travailler sur le rapport entre l’« instituant » et l’« institué », c’est-à-dire entre espaces d’expérience qui élaborent ses propres normes (autonomie) et les cadres de travail dont les normes viennent de l’extérieur (hétéronomie).
À ce titre le fonctionnement organisationnel et décisionnel
du LISRA emprunte à une vie en réseau inter-régional d’acteur-chercheurs dont
chaque initiative peut représenter un point nodal. L’entrée et l’orientation
dans l’association sont déterminées par la possibilité de développer une axiologie
en recherche-action selon les axes épistémologiques, méthodologiques et
stratégiques décrits dans le présent texte.
L’orientation stratégique du LISRA se décline en plusieurs axes complémentaires :
- Accompagnement d’expérimentations sociales par
la recherche-action et la structuration d’initiative sur les territoires. - Valorisation des savoirs par l’écriture
réflexive dans la mise en place d’ateliers régionaux de recherche-action et
ouverture de passerelle vers la formation. - Développement de recherches collaboratives en
partenariat avec des institutions pour le renforcement d’un tiers-secteur de la
recherche et des dispositifs appropriés. - Valorisation du rôle de la culture comme outil
de transformation sociale et forme de résistance. - Mobilisation et animation d’un réseau national.
La dimension du « tiers » permet
d’appréhender cette situation complexe en dépassant la dichotomie entre acteur
et chercheur, recherche et action. Le tiers produit un décalage où chacun est
invité à faire un pas de côté vis-à-vis de sa posture sociale et professionnelle
habituelle. Cela permet de modifier les critères qui donnent une valeur à la
production de savoir, autrement dit, les critères d’évaluation des
dispositifs scientifiques et opératoires.
Le laboratoire social est l’un de ces dispositifs qui correspondent à ce processus (écriture réflexive, ateliers de recherche-action, formation-action, entretien autobiographique, enquête conscientisante, etc.). Il contribue à l’identification et l’élaboration de lieux sur les territoires que les acteurs-chercheurs peuvent solliciter au service de leurs démarches. Nous aidons dans la mesure du possible à la négociation et la pérennisation de ces lieux d’accueil inconditionnel dépassant les logiques verticales sectorielles et disciplinaires au sein des structures de toute nature dans le cadre de partenariat pouvant amener à des recherches collaboratives (exemple de la Maison des Sciences de l’Homme Paris-Nord).
Les laboratoires sociaux peuvent être provoqués dans la négociation d’une commande institutionnelle ou naitre initialement comme « zones temporaires autonomes », par un auto-missionnement des acteurs engagés dans une situation donnée. Prenons l’exemple du collectif « Rues Marchandes » : il répond à la situation des récupérateurs-vendeurs de rue, comme réalité sociale qui convoque une recherche-action stratégique dont la production de savoirs est réappropriable par les principaux intéressés, sous forme d’expérimentations sociales permettant de dégager des alternatives en termes de cadre de pensée et d’action (en l’occurrence, dans cet exemple en termes d’économie populaire).
La reconnaissance de centralité populaire conduit à un décentrement
des lieux de pouvoir / savoir, à un autre rapport du centre à la périphérie en
tant que tiers espaces, plaçant les territoires délaissés et les populations
invisibles au centre de nouvelles formes d’université populaire et de modes
opératoires impliquant une vision politique, un engagement, un rapport à la
durée.
À ce titre les laboratoires sociaux doivent prendre en compte les conditions de précarité dans lesquelles sont plongés les travailleur(se)s intellectuel(le)s et plus généralement tous les porteurs de dispositifs associatifs et coopératifs qui misent sur l’intelligence sociale, aussi bien dans le domaine des sciences humaines et sociales que dans les mouvements sociaux.
Le LISRA veut contribuer à la mise en récit de ces expériences individuelles et collectives qui permet à la fois de se réapproprier une histoire (écrire et ne pas être écrit par…) et de valoriser la production de savoir à travers différents supports (plate-forme recherche-action.fr, publications, séminaires, forums).
C’est aussi la possibilité pour chaque personne ou collectif
en légitimant la posture d’acteur-chercheur de reconstituer une cohérence
existentielle, de créer des zones d’autonomies et d’émancipation indépendamment
des formes concurrentielles et productivistes imposées par les modèles
économiques. Ainsi, les savoirs issus des pratiques au même titre que la
culture libre, les besoins sociaux et environnementaux font partie de ce bien
commun essentiel nécessitant un autre mode de gestion et d’organisations que
celui de la marchandisation.
L’innovation sociale comme nous l’entendons a pour but de répondre concrètement aux besoins fondamentaux par une démarche créative et coopérative. Cette démarche se veut à l’inverse d’une logique de « disruption » qui n’est que la transmutation du capitalisme d’une forme industrielle à une forme cognitive et son extension à de nouveaux marchés (solidarité, santé, social, recherche, culture…) par l’emprise du modèle entrepreneurial sur tous les champs de l’activité humaine et la numérisation de toutes formes culturelles.
Les modalités de cette production de savoir issue l’expérimentation sociale ne peuvent donc être détachées d’une analyse critique des rapports sociaux dans lequel sont produits ces savoirs. En d’autres termes, il ne peut y avoir de justice sociale globale sans justice cognitive globale, c’est-à-dire sans reconnaissance de la pluralité des savoirs et des modes de production de connaissances en commençant par la valorisation et le libre accès des savoirs et des savoir-faire issus de la pratique et de l’expérience, une décolonisation de la recherche et du développement au service de formes endogènes, déconcentrées, autonomes de la pensée et de l’action.
Signataires :
- Aigron Lucile, Tiers-Lieux, Nouvelle-Aquitaine
- Antoine Claire, Facilitatrice de l’innovation – facilitation graphique, Clermont-Ferrand
- Alfieri Valeria, sociologie politique et sociologie urbaine, Lille, Nice
- Arnodin Camille, Etudes qualitatives et participation citoyenne, Ile de France
- Artison Vincent, Pratique – Formation – Recherche, Tiers sociétal® (travail de rue, éducation, médiation, Suisse et international
- Aissani Lalia, Responsabilité Sociétale des Organisations, Ile de France
- Aouizerate Sophie, Consultante et Formatrice, Longjumeau
- Balaï Christine, Transition sociale économique environnementale inclusive, LISRA, Ile-de-France, France, International
- Bazin Hugues, chercheur en sciences sociales, LISRA Ile de France
- Bechennec Morgane, éducation spécialisée, Seine Saint Denis
- Bel Arthur, architecture et urbanisme, Auvergne Rhones Alpes
- Bellanger Julien, technocritiques conviviales, LISRA, Nantes
- Ben Ali Sabra, Psychologie clinique, Bordeaux Gironde
- Bodinier Gabriel, Droit la Ville, Grenoble
- Broyelle Fanny, Directrice adjointe Laboratoire Transfert, Nantes
- Caillaud Stéphane, Dynamiques collectives de transitions territoriales, région Centre
- Cardona Pierre-Alain, développement local, Marseille PACA
- Cazottes Ewelina, sociologue, laboratoire CRESPPA-GTM, Paris 8, Ile de France
- Chabassier Joane, formation dans le champ social, Limoges
- Chevallier Bruno, Droits de l’Homme/Biotechnologie, 91 nord- 94
- Ciais Grégory, chercheur autonome en sciences sociales, LISRA, Limousin
- Curie Raymond, Sociologue, Lyon
- DIAZ Emilia, Formation, Montpellier
- Decamp André, Animateur d’éducation populaire, Yvelines
- Defossemont Flore, Centre de création et d’innovation spectacle vivant, Ile de France
- Dehove Claire, artiste-chercheuse initiatrice de WOS/agence des hypothèses, Paris
- Desert Marie, Arts plastiques, Saint-Maur
- Diabaté, Education spécialisé, Paris
- Doudouh Jaoued, l’informalité dans les quartiers populaires et la mondialisation par le bas, Grenoble
- Dumont Jean-Luc, Recherche sciences humaines et sociales, Ile de France
- Durand Jeanson Alexis, Développement et innovation territoriale, Occitanie
- Dreau Victorine, Doctorante en Architecture, accompagnement à l’auto construction a Medellin, Colombie
- E. Santo Carolina, artiste et chercheuse indépendante, Paris
- Elomari Driss, Spécialiste en Communication digitale, université Sidi Mohammed Ben Abedellah, Maroc
- Esteller Mélanie, Développement Social, Paris et banlieue parisienne
- Farzad Mehdi, Formation – Éducation – Recherche, Collège Coopératif de Paris, Ile De France, Sénégal
- Figueira Clarissa, Doctorante en Sciences de l’Éducation, ESS et travail social, Île de France,
- Fredriksson Sylvia, designer, Lyon
- Fromont Hélène, Formation Accompagnement et Intervention par la Recherche-Action, Ile de France
- Galeandro-Diamant Laure-Anna, Education Spécialisée – sociologie, Rennes
- Gentile Mélissa, Tiers-Lieux, danseuse, Nouvelle-Aquitaine,
- Ginoccki Odile, Recherche Action Tiers lieux, Nouvelle Aquitaine, IDF
- Girard Vincent, santé publique:santé mentale, Marseille
- Giroguy Christophe, chef de projet, LISRA Nice PACA
- Glenat Jean-Marc, Formation et recherche en travail social, Nîme
- Gondol Marie Francoise, « La Chimère Citoyenne« , Grenoble
- Goyet Georges, Développement territorial, Action-Recherche, relations arts sciences, Loire, Rhône Alpes
- Grassineau Benjamin, Socio-économiste (recherche-action, culture libre et gratuité), CEDREA, GratiLab,
- Grebe Cristóbal, Chercheur en sciences sociales, Saint-Denis, France / Chili
- Guerrier Nicolas, doctorant en sociologie, développement associatif, LISRA Limousin
- Guien Jeanne, docteure en philosophie, obsolescence, gaspillage, critique économique, LISRA Ile de France
- Hagel Hélène, Accompagnatrice à la formation éducation populaire, Indre et Loire, région Centre-Val de Loire
- Huser Martine, Biffine retraitée, Paris
- Imbert Pascale, psychologie, Dordogne
- Juguet Stéphane, anthropologue, directeur de l‘agence What Time, Nantes / Ivry/Seine
- Kellenberger Sonja, Sociologie, Anthropologie, Travail social, formation, Dijon
- Kherfi Lakdar, Chef de projet Médiation Nomade, soirées des quartiers populaires, France
- Lecoq Maxime, Ingénierie Sociale et Culturelle, Rennes
- Lequin Julie, Agriculture et alimentation dans les territoires, Dordogne, Gironde, Ile de France, France
- Malatray Gilles, Paysages sonore et écologie sonore, soundwalking, Lyon, France, Europe
- Marongiu Hervé , Danseur du Collectif Sans Tête, Rennes
- Mathon Hélène, auteure et metteuse en scène, Montreuil, Toulouse
- Martin Céline, Ingénieure d’études sciences humaines et sociales, Rennes
- Mennella Leslie, Sciences politiques et Sociales / chargée de projets culturels, Occitanie
- Merle Thierry, Accompagnement des transitions, Rennes
- Mialon Antoine, Architecture urbanisme, Aubervilliers, Seine Saint Denis
- Michel Franck, Anthropologie du voyage, France, Chili et Indonésie
- Mmadi Ibrahima, Diplômé en sociologie et politique de la ville, Nice Conseil citoyen Ariane/le Manoir
- Mongis Baptiste, doctorant en sociologie, Institut des Hautes Etudes sur l’Amérique latine, Paris
- Monguillon Nathalie, Artiste peintre Dijon, doctorante en science de l’éducation à Lyon2, ATD Quart Monde et CNLE
- Mousset Pascale, Innovation sociale, Livinglab, reconnaissance ouverte, Vendée, Pays-de-la-Loire
- Mugel Emily, Architecture, Paris, Briançon
- Olmedo Adriana, peintre
- Ott Laurent, Pédagogie sociale, LISRA, Ile de France
- Pachod Laurent, sociologie, recherche et formation en travail social, Auvergne / Rhône-Alpes
- Panagos Mélina, Chargée de mission Genre et Espace public, doctorante en sciences de l’information et de la communication, Nice
- Paturel Dominique, HDR Sciences de Gestion, UMR 921 Innovation, démocratie alimentaire, LISRA, Montpellier
- Pawlowsky Richard, Hypercrate, Action-Recherche, infra et hyper structure AIR, CristalS, VotezPourVous, Bordeaux, Marseille, Paris
- Peyre Isabelle, développement associatif, LISRA Ile de France, Mali
- Pilloix Thibault, Géographie, transition des territoires touristiques, Grenoble
- Pionneau Maxime, Journalisme, Calvados
- Piote Mathilde, Ingénierie de formation pour adultes dans le champs de l’éducation populaire, Indre et Loire
- Pivert Léa, Economie sociale et solidaire, Metz
- Poisson Fransez, Jeunesse, Exil, Rennes
- Pouthier François, Culture et développement territorial, Bordeaux
- Quenet-renaud Anton, Musique & Bricolage, Nantes
- Ramanitra Mahieu, Doctorat sciences du langage université paris 13, Créteil
- Santiago Núñez Regueiro, Solidarité Internationale, Praticien/évaluteur et Chercheur, Paris
- Reverdito Nicolas, directeur Pick Up Production, Nantes
- Ribet Yann, activiste hip hop, Grenoble
- Ros Élodie, sociologue et docteure en science politique, ESS, LISRA Ile de France
- Roux Louise, Artiste-chercheuse, Arts vivants, Paris, Saint-Denis
- Sapin Eric, Péniches associatives – Éducation à la paix, volontariats,vie fluviale, Ile de France, Juvisy et Paris
- Senegas Élisabeth, animatrice de ‘La Chimère Citoyenne‘, LISRA, Grenoble
- Serero Pierre Louis, démocratie locale, expertise d’usage en particulier des personnes pauvres et précaires, Grenoble
- Shungu José, Musique/ médiation culturelle, Besancon, Bourgogne-Franche-Comté
- Sidibé Ahmed iyane, Pédagogie ludique, Dakar
- Slimani Mehdi, Auteur/Chorégraphe Cie No MaD, LISRA, Ile de France
- Slimani Radia, Ingénieure en énergétique et militante, Bordeaux
- Souchard Nadine, Recherche-action coopérative, formation-action, région Bretagne et grand ouest
- Tahar Bouhouia, Docteur en sociologie des organisations et éducateur de rue, Paris, anthropologie
- Techer Rieul, Recherche et ingénierie sur les transitions, Lyon
- Tesla Ida, Artiste-artiste associée à Pih-Poh, Tours
- Vieille-Grosjean Henri, anthropologie, Strasbourg + Afrique + Amér; Centre et Sud
- Voegeli Mael, Recherche pedagogie medicale cooperative, Inde
- Weis Christian, bio géographe, écologie, LISRA Allier Auvergne
- Yebba Yassir, Alimentation et territoires, Niort, Deux-Sèvres, Nouvelle-Aquitaine
- Zorraquin Victoria, Animation socioculturelle, LISRA Nantes
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