No 36 – Sommaire / Edito

Sommaire

En bouclant ce dossier nous nous sommes aperçus que nombreux thèmes abordés ici mériteraient un prolongement. Cependant l’ampleur du sujet rend l’exhaustivité difficile.
Fruit de plusieurs mois de rencontres, de travail entre jeunes du « Mouvement », travailleurs sociaux, universitaires et chercheurs, le numéro 36 de PEPS est conçu comme un outil de réflexion.
Le premier chapitre donne quelques clefs de compréhension en retraçant les sources de la culture urbaine et propose une définition des principaux termes employés dans ce dossier.
Le second chapitre pose un regard sur les mouvements et mutations sous la forme d’une critique sociale.
Le troisième chapitre envisage comment ce phénomène conduit à une évolution des institutions d’éducation et d’insertion.
L’équipe du dossier,
Ali ABDERRAHMANE, Hugues BAZIN, Raymond CURIE, Mehdi FARZAD, Damien MABIALA

Chapitre 1 : Mémoires

A partir du moment où on a commencé par falsifier notre histoire, il faut qu’on réagisse en reprenant notre histoire et notre culture.

  • P.6 : Le rock est mort vive le rock par Jorge de la Barre
  • P.10 : Reggae et hip-hop par Hugues Bazin
  • P.11 : Aux sources du raggamuffin par Super John
  • P.12 Nation Zulu par Damien Mabiala
  • P.14: Dix ans d’histoire dans les banlieues par Adil Jazouli
  • P.18 : Brève histoire du hip-hop français par Georges Lapassade
  • P.21 : Tag, Graff, danse et rap par Damien Mabiala

Chapitre 2 : Regards

C’est la perception de ce qui est visible : les bandes l’État, la retranscription des faits par les médias. En fait, peu de gens savent ce qui se passe…

  • P.26 : Le hip-hop dans la société médiatique par Georges Lapassade
  • P.32 : Les bandes, mythes et réalités par Adil Jazouli
  • P.34 : Histoire des bandes, reflet de la société par Maryse Esterle
  • P.38 : Identité, violence et critique sociale par Raymond Curie
  • P.41 : Histoire d’Antonio pas Pascal Obolo
  • P.42 : Vent de couleur sur la ville par Nathalie Begot
  • P.43 : Femme de Toulouse par Karima Ouabache

Chapitre 3 : Mouvement

Des jeunes disent appartenir un mouvement mais dans quel mouvement sincère les traverses sociaux entre parenthèses et autres professeurs, éducateurs, universitaires, intervenants), de quelle appartenance revendique-t-il ?

  • P.46 : Hip-hop, un défi pour les traverses sociaux par Guy Magin
  • P.48 : Pour une véritable action sociale par Anne Lyse Viel
  • P.50 : Lutte contre l’échec scolaire par Mehdi Farzad
  • P.56: Un espace culturel à l’université par Georges Lapassade

Édito

PEPS se mettrait-elle à «rapper» ? Il est de bon ton aujourd’hui pour paraître «branché» de suivre ce mouvement. Certains médias, producteurs ou décideurs peu scrupuleux cherchent à récolter quelques bénéfices en le parant des habits de la mode. Nous ne désirons pas jouer à ce «top 50» dont la superficialité transforme une aspiration légitime à la dignité d’une frange importante de la population en un simple produit de supermarché.
Il ne se déroule pas une semaine sans que paraisse un article extasie sur ce «nouveau phénomène» ou qu’un politique découvre éberlué une banlieue avec des gens qui y vivent et s’expriment, parfois avec violence.
Le nombre de paroles déversées sur le «phénomène» social et culturel urbain est inverse-ment proportionnel à la connaissance effective de ce qui se passe aujourd’hui dans la rue. Les médias, en premières lignes des accusations, représentent fidèlement un système basé sur l’immédiateté et l’événementiel. L’événement existe, il est d’un autre ordre. Sans être spectaculaire il révèle une mutation profonde.
Ce dossier – fruit du travail d’un collectif (jeunes, travailleurs sociax, universitaires,…) – s’inscrit dans une démarche d’ensemble:
Le numéro spécial de PEPS «Banlieue Cent Visages» (mars 89) suivi en mars 90 par la rencontre nationale du même nom, partait d’une intuition qui nous est apparue à tous comme une évidence:
– il existe une fracture profonde de la société, nous parlions de «société à deux vitesses»
– dans des zones urbaines – appelées «banlieues» -, étaient en train de se forger les outils qui transformeront la société de demain
– que l’un de ces outils puissants était représenté par l’expression culturelle et artistique; moyen de reconnaissance et d’affirmation d’une dignité.
– enfin qu’il était urgent et vital de tisser des réseaux, de renouer les fils d’un dialogue entre les principaux acteurs (la population des 15/30 ans principalement) et les différents partenaires et intervenants dans les quartiers (travailleurs sociaux, élus, représentants institutionnels et ministériels)
– que ces liens devaient être directs et marquer la fin de l’aristocratie de ceux qui «parlent pour..» ou «font pour…» Il fallait restituer aux jeunes leur titre «d’auteur».
Les événements qui se sont précipités depuis ont confirmé cette première perception; et quand M Delebarre rencontre directement des jeunes de Sartrouville (2), il ne fait pas preuve d’une «politique éclairée» mais d’un simple bon sens.
Nous pouvons regretter qu’il eut fallu autant d’années et de sang versé pour reconnaître l’évidence. Mais l’heure n’est plus au constat. Il est temps pour tous, non pas de mettre en place un nouveau développement, mais réinventer la notion de développement qui rangera enfin dans les rayons de la caricature les murs des cités transformés en murs d’escalade au même titre que le concept révolu «d’intégration».
Ceci exige de comprendre de façon intime les bouleversements et les mutations qui s’opèrent actuellement en commençant par ce qui en constitue la fibre même: le sentiment d’appartenance et de dignité.
Ce dossier pose une première pierre. Il sera suivi d’autres actions significatives tout au long de cette année qui reprennent les principes et la méthodologie de «Banlieue Cent Visages»: se doter de moyens de réflexion et de formation, ouvrir un espace de rencontre et d’expression…. Nos lecteurs en seront bien sûr les premiers informés.
Hugues BAZIN

(1) Le mardi 26 mars Djamel Chettouh (18 ans) habitant la cité «des Indes» à Sartrouville (banlieue nord-ouest de Paris) est tué par un vigile du centre commercial «Euromarché». Ce meurtre déclenche chez les jeunes de la cité une révolte attisée par les propos du maire de la ville qui les traite de «voyous»… Après plusieurs jours de flottement politique (aucun responsable gouvernemental n’ose se déplacer), Michel Delebarre, Ministre de la ville, rencontre une délégation des jeunes de Sartrouville le 4 avril à Versailles.