VERS UN NOUVEAU PROJET DE PEPS…

Plusieurs raisons ont conduit l’association Paroles et Pratiques Sociales à adopter un nouveau projet pour les années qui viennent. La plus importante caractéristique de ce nouveau projet se situe au niveau de l’objet de PEPS qui ne sera plus les travailleurs sociaux, comme cela fut le cas il y, treize ans, mais les questions sociales. Cela permettra à l’ensemble des professionnels, (travail social, école, culture, justice, entreprise …), de se réunir ensemble autour de la même table et du même objet, c’est à dire les questions sociales. Ceci réunira également les conditions favorables pour que de multiples compétences (pratiques et théoriques) se négocient et se mobilisent autour des questions sociales deve¬nues de plus en plus complexes. Une lecture analytique des étapes importantes qui ont marqué l’histoire de PEPS nous a aidé à mieux comprendre cette nécessité du changement, basée sur plusieurs indicateurs déjà repérés, au niveau social; mais aussi dans la structure de PEPS et chez les personnes qui contribuent à sa réalisation. C’est à partir de cette analyse que nous avons pu, tout en gardant les acquis de PEPS, réactualiser son projet Afin de rendre intelligibles les décisions prises au sein du collectif, un bref historique de la mise en place de l’association en 1982 s’impose. Elle nous aidera à mieux identifier les changements qui ont traversé PEPS depuis sa création. Nous terminerons en exposant les grandes lignes qui définissent le nouveau projet.

TOUT A COMMENCÉ EN 1982

TOUT A COMMENCÉ EN 1982
L’association Paroles et Pratiques Sociales est née en 1982 d’un contexte social et politique particulier. L’initiative est venue d’un groupe de travailleurs sociaux en formation qui voulaient se donner un espace d’expression, un lieu de parole, un réseau de circulations d’informations et de réflexlhs autour de leurs pratiques professionnelles. Ils ont très rapidement mis en place un projet de journal, réalisé par et pour les travailleurs sociaux. Les moments les plus importants qui ont marqué l’histoire de PEPS, peuvent se résumer ainsi :

  • Le premier moment est essentiellement consacré à l’inscription d’une « écriture narrative » des pratiques sociales. Forte¬ment liée à la conjoncture socio-politique des années 80, cette période a été marquée d’une part par l’expression du besoin des travailleurs sociaux à reprendre une parole « con¬fisquée par les intellectuels et d’autre part, par un discours plutôt idéologique et égalitaire en résonance avec les problèmes sociaux.
  • Le deuxième moment se caractérise par la volonté de PEPS dé s’investir dans un travail rédactionnel en partenariat avec des structures associatives cherchant à manifester leurs pra¬tiques dans le champ du travail social. Cette ouverture a donné lieu à des manifestations telles que la réalisation de plusieurs numéros spéciaux sur la toxicomanie, les nouvelles pratiques économiques et sociales, les prisons, le phénomène des banlieues, les droits de l’homme, etc., en collaboration avec diverses associations (STAJ, LPS, AEUF, CREAF, Mémoire Fertile, Otage, les Centres sociaux).
  • Le troisième moment a débuté avec la nécessité de publier des numéros avec un thème central. Cette thématisation vi¬sait à la fois une réflexion plus approfondie des questions abordées, mais aussi un prolongement de la réflexion sur le terrain. L’exemple des numéros consacrés aux Banlieue cent visages, Les cultures de la rue, rendent compte de cette démarche. C’est également dans cette logique que PEPS a pu organiser un colloque en 1985 sur Les travailleurs sociaux, acteurs de l’avenir du social et participer en 1988 à l’élabora-tion d’un colloque inter-institutionnel sur Les politiques locales et Toxicomanie. En mars 1989 par exemple, elle a pré-paré la rencontre nationale Banlieue Cent visages et suite à la sortie du numéro 36 sur Les cultures de la rue, elle a orga-nisé un forum regroupant plusieurs associations de jeunes, des acteurs, des décideurs, ainsi que plusieurs personnalités du monde universitaire, du journalisme et de la culture… Sur le plan rédactionnel, cette période peut etre définie comme une période de production d’écriture coopérative dans la mesure où la rédaction des textes se faisait en groupe et de façon évolutive étalée sur plusieurs séances.
  • Le quatrième moment se caractérise par plusieurs changements importants sur le plan rédactionnel, technique et de discipline méthodologique. La revue PEPS est « sortie » en quelque sorte de l’amateurisme, avec notamment la mise en place des rubriques généralistes, regroupant la plupart des thèmes liés aux questions sociales. Mais cette période correspondait également à une réalité qui traduisait une nécessité de changement pour le projet de PEPS ;— Adapter de nouvelles formules d’exploration des questions sociales—. C’est cette nécessité qui a pu jouer un rôle d’analyseur pour la mise en place d’un nouveau projet à la veille du XXIème siècle. (Sur le terme analyseur, voir, Rémi Hess et Antoine Savoye, Analyse institutionnelle, Puf, « Que sais-je ? », 1993).

L’UTILITÉ DE PEPS : AUJOURD’HUI

Les interrogations collectives des membres de l’association , Paroles et Pratiques Sociales ont confirmé l’idée selon la-quelle avoir un espace libre, autonome et non corporatiste dans le champ social était plus que jamais nécessaire. Car, il n’existe pas ou très peu de lieux d’échanges et d’auto-formation indépendants pour des professionnels des questions sociales, confrontés aux complexités des situations, souvent décrites et vécues en décalage avec leurs formations initiales et avec les politiques institutionnelles mises en place. Nous faisons le constat qu’il manque un espace de réflexion et d’inscription des pratiques qui permettrait de créer de nouveaux outils pour les praticiens, des usagers, des étudiants en formation initiale, des formateurs, des chercheurs, des bénévoles, etc. Créer un espace de recherche participative où à partir des compréhensions contextuelles des situations, on pourra adopter des approches critico-alternatives par rap¬port aux problèmes sociaux. Ceci nous aidera à comprendre en quoi les solutions instituées ne répondent pas toujours aux attentes des usagers ni à celles des professionnels. En ce sens, PEPS pourrait être un espace caractérisé par un effort d’analyse et de conceptualisation des pratiques des indivi¬dus qui seront amenés à présenter des expériences inédites localement réalisées. Cette recherche transversale d’outils d’analyse pourrait intéresser aussi bien les usagers, des professionnels que des décideurs institutionnels.
Plusieurs raisons nous encourageaient à adopter un change-ment :

  • en ce qui concerne la version 1982 de PEPS, nous avons en effet constaté qu’elle correspondait à un contexte politique, social et culturel particulier. Aujourd’hui, ce contexte n’est plus le même et la première version de PEPS devient quel¬que peu caduque,
  • les membres actifs de l’association ne sont plus majoritairement des « travailleurs sociaux de base », comme cela fut le cas il y a treize ans. Ils sont surtout des chercheurs, des formateurs, des enseignants universitaires. En ce sens, PEPS ne peut pas ne pas intégrer les activités de la recherche et de la formation dans ses programmes,
  • le traitement des questions sociales fait appel à une réunion de compétences multiples venant de secteurs professionnels divers, car le temps où chaque secteur professionnel envisageait certains problèmes sociaux comme sa « chasse gardé . est fini. Par exemple, la question de la violence des jeunes ne peut être considérée comme seule affaire de l’école, ni celle des travailleurs sociaux. Ceci nécessite une approche multiréférentielle des questions sociales, exigeant une autre approche qu’une simple compilation de textes certes très intéressants, comme nous le faisions jusqu’alors, depuis deux, trois ans, l’expression libre et narrative des pratiques des travailleurs sociaux, qui auparavant caractérisait la revue, n’existe plus. Ceci rendait progressivement la charte . de PEPS inadaptée,
  • nous avons donc pensé que l’activité rédactionnelle de PEPS devait reposer sur les initiatives de recherche et de formation qui désormais devront figureront dans les objectifs de l’association. La revue ainsi pourrait devenir un outil de forma¬tion. Nous avons remarqué que pour ne pas rester des observateurs silencieux face aux questions sociales, l’associa¬tion Paroles et Pratiques Sociales ne pourrait se développer qu’avec l’adhésion et le soutien d’une équipe élargie et d’un nouveau projet dans lequel chacun trouverait sa place.

PEPS : DEMAIN

La réflexion sur les ressources matérielles et intellectuelles de PEPS ont permis de présenter un nouveau projet pour les années qui viennent. Il comprend trois dimensions activités de formation, de recherche et de publication.

Études/Recherches

L’association décide de suivre un axe de recherches sur les questions sociales, dans une logique participative. Les con-ditions qui favorisent et motivent l’équipe sont nombreuses :

  • PEPS possède un acquis considérable en matière d’analyse et de problématisation des thèmes relatifs aux questions sociales. Ce capital d’expériences peut être utilisé et mobilisé pour les explorations relatives aux études et recherches. Parmi les publics potentiels, on peut notamment citer les associa¬tions de quartier, les structures sociales, les banlieues, les écoles de travail social et les universitaires intéressés par les sciences humaines et sociales, pour qui PEPS peut intervenir seul ou participer en partenariat.
  • PEPS est en relation directe avec le terrain et les acteurs du changement. Cependant, la plupart des personnes qui inter-viennent pour PEPS mènent par ailleurs des expériences de recherches dans le cadre de leur profession ou de leurs études supérieures (étudiants-chercheurs-formateurs).
  • Les difficultés sociales ne peuvent plus trouver leurs « solutions » dans les réponses officielles des institutions et de la hiérarchie étatisée. Elles nécessitent une réflexion souvent en dehors de toute recommandation institutionnelle. Parmi les thèmes de recherche, ont peut notamment citer la dé¬marche ethnographique des pratiques socio-éducatives, les nouvelles technologies au service de la communication, le développement au Nord et au Sud, la reconnaissance des acquis en situation de formation et d’insertion, les cultures professionnelles, les cultures de la rue, l’approche psychanalytique des questions sociales, la violence des jeunes, la délinquance juvénile, etc. Une approche transversale et multiréférentielle de ces différents thèmes pourrait aider les praticiens à redéfinir leur culture professionnelle (éducative, sociale, scolaire et culturelle…).

Formation

L’association Paroles et Pratiques Sociales est un organisme de formation. Depuis 1982, elle a mené plusieurs expériences de formations dans les domaines du travail (social, édu¬catif, culturel, la communication et la formation des travailleurs sociaux). Aussi bien au niveau des contenus qu’au niveau des outils méthodologiques, PEPS est en mesure de proposer ses expériences aux autres acteurs sociaux. Au sein de l’Association Paroles et Pratiques Sociales, existe une équipe pluridisciplinaire ayant des pratiques professionnelles diverses, des formations complémentaires, des expériences de mise en place de projets et enfin, la réalisation de la revue. Leur domaine d’intervention vient des sciences de l’éducation, de la sociologie, de la psychologie, de l’ethnosociologie, de l’ethnographie, de l’analyse institutionnelle, de la psychanalyse, de la linguistique…). Parmi les thèmes de formation que nous proposons, l’écriture, est de nos spécificités et constitue un objet d’intervention dans les structures à vocation sociale. En situation de formation ou d’exercice, en effet, l’écriture est souvent pratiquée sous sa forme contraignante, et son utilisation par des professionnels a pour fonction principale l’apprentissage et l’intériorisation des normes instituées, la notation, la catégorisation, etc. Pour les étudiants par exemple, l’adhésion obligatoire à cette écriture est observable tout au long de la période de formation (la rédaction du mémoire, les soutenances, etc.). Ces mêmes étudiants une fois arrivés sur le terrain et dans la vie professionnelle, rendent compte souvent du décalage existant entre le contenu de leur formation et les réalités du terrain. L’écriture utilisée dans le cadre professionnel est alors une écriture administrative, normative, « officielle * et surtout une écriture vide. Dans cette pers¬pective, la position d’extériorité de PEPS, sa compréhension du phénomène favoriserait une expressions écrite libre et instituante, en même temps que la conceptualisation des événements décrits. Ces praticiens, étudiants, ou bénévoles associatifs sont invités à écrire d’une façon nouvelle qui prenne sens pour eux, mais aussi pour la structure et ses partenaires, voire pour les publics avec lesquels ils travaillent.
D’autre thèmes de formation peuvent être proposés par PEPS. On peut, en particulier, évoquer les pratiques socio-éducatives, l’approche ethnographique des pratiques socio-éducative, le développement au Nord et au Sud, les pratiques de reconnaissance des acquis en situation de formation et d’insertion, les activités éducatives péri-scolaires, les cultures professionnelles, les cultures de la rue, l’approche psychanalytique des questions sociales, la violence des jeunes, etc.

Publication

En tant que fonction fédératrice, la publication constituera désormais une activité encore plus importante et avec des exigences nouvelles au sein de l’association Paroles et Pratiques Sociales. Son rôle va être centré essentiellement sur l’enrichissement des activités de recherche tout en servant d’outil d’information pour les adhérants de PEPS. La revue va rester la voie privilégiée de l’expression libre des personnes intéressées par les questions sociales et un moyen de communication à leur service. Le fait que l’ensemble des réflexions menées lors des formations et des recherches soient consignées, permettra aux auteurs une autre forme d’évaluation de leurs expériences.

STRATÉGIES DE DIFFUSION

L’ensemble des textes présentés dans ce numéro, ont été organisés en fonction du nouveau projet de PEPS. Dans la première partie de l’ouvrage, et à partir des expériences de PEPS, les auteurs ont cherché à dresser un constat de la situation sociale. Chaque texte débouche sur une proposition qui se présente comme un projet de recherche.
Aussi, le nouveau projet de PEPS mérite être diffusé par tous les moyens : information, organisation de réunions dans les associations de quartier, les structures socio-éducatives, les Institut Universitaires de Formation des Maîtres, les organismes de formation, les écoles de travail social, les universités, etc.). La réussite de ce nouveau projet nécessite une augmentation du nombre d’adhérents et d’abonnés et un investissement dans d’autres villes que Paris. Nous avons un ef¬fort considérable à faire pour développer des réseaux locaux de professionnels non-Parisiens, qui comme nous l’avons constaté, sont souvent en manque d’informations, et des lieux d’échanges. Le nouveau projet de PEPS doit inscrire dans ses perspectives, une étude sur ses expériences menées depuis treize ans. Cette étude peut permettre aux personnes qui souhaitent adhérer à PEPS de mieux comprendre l’histoire des questions sociales traité par PEPS et leur cheminement. Elle pourra également sensibiliser l’implication des étudiants en formation initiale à cette recherche.

No 54-55 – Sommaire / Edito – Reconnaissance et validation des acquis

Sommaire

La reconnaissance et la validation des acquis

  • La reconnaissance et la validation des acquis : approche historique, par Guy Berger et Mehdi Farzad
  • La reconnaissance et la validation des acquis : les enjeux, par Nicole Meyer
  • Nouvel esprit anthropologique en reconnaissance et validation des acquis, par Gaston Pineau
  • Reconnaissance et validation des acquis : sens et procédures, par Jacques Aubret
  • La dimension interculturelle de la reconnaissance des acquis, par Mehdi Farzad
  • Validation des acquis dans l’enseignement supérieur : Les stratégies du retour aux études, par Saeed Paivandi
  • Profil d’auto-orientation, par Jean-Luc Dumont
  • La reconnaissance des acquis, levier de l’insertion, par Émile Gagnon
  • Bibliographie générale du dossier

Les recherches africanistes, par Damien Mabiala

Pour une recherche africaniste affrontant la crise des sociétés africaines, par Pierre-Philippe Rey

Présentation de livre, par Driss Alaoui

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Edito

Le présent numéro de Paroles et Pratiques Sociales s’inscrit dans le prolongement de son projet rédactionnel annoncé lors de sa précédente publication.
Les contributions qui le constituent obéissent aux règles basées sur le travail de terrain et tentent de développer un thème parmi d’autres : la reconnaissance et la validation des acquis.
La particularité de l’objet, étudié sous forme du dossier, vient du fait qu’il porte un regard dynamique sur les pratiques sociales, tant dans le domaine de la formation, de l’éducation que de la gestion des ressources humaines : — L’homme en tant que sujet-acteur est au coeur des dispositifs —.
La problématique de reconnaissance et de validation des acquis s’impose aujourd’hui à la société et cherche à proposer une approche nouvelle des compétences et des rôles des individus et ceux qui les accompagnent dans leur parcours de formation ou d’insertion socio-professionnelle.
Son intégration au sein des institutions de l’enseignement supérieur et sur le terrain de l’insertion, ouvre des perspectives nouvelles en matière de relations pédagogiques. Elle demande des savoir-faire actualisés des modes d’évaluation, échappant aux règles et aux schémas habituels, basés très souvent sur l’approche académique de l’apprentissage des connaissances.
Le point commun entre les différents textes repose sur le projet rédactionnel de PEPS qui met l’accent sur l’approche multiréférentielle des questions sociales. Bien que toutes les contributions visent les relations humaines et leur complexité, cependant, les supports théoriques et méthodologiques n’appartiennent pas à une seule École de pensée.
En ce sens, ce dossier cherche à contribuer au débat en cours dans ce domaine…

Mehdi Farzad

No 45 – Sommaire / Edito

Sommaire

Regard sur l’actualité

  • Qui casse Qui ?, Hugues Bazin – P.4

Rencontre avec …

  • Interview avec Tobie Nathan, Damien Mabiala – P.7

Mémoire du travail social

  • De Vichy à la Libération , Armelle Mabon-Fall P.10

Travail social à l’étranger

  • Saddam-City, ou «désespoir- city», Alice Bsereni – P.12

Dossier : Les enjeux de la formation

  • Introduction, Mehdi Farzad – P.14
  • Le travail social aujourd’hui ou l’art de « bricoler », Didier Martin – P.16
  • Étrange formation, Jean Jacques Deluchey – P.18
  • Une formation en transversalité, Marie Françoise Gerard, Joëlle Garbarini, Michel d’Aspe, Yves Ballanger – P23
  • La Garanderie : un atout pour la formation professionnelle ? , Patrick Tapernoux – P.25
  • Écrire comme moyen d’auto-formation, Chantal Brun – P.27
  • De l’éducateur au formateur, Joël Besnard – P.30
  • Des vraies-fausses raisons de réformer la formation, CAS 69 – CONCASS – P.33
  • Défendre les centres de formation, Coordination Régionale des Centres de Formation Pratiques sociales – P.35

Pratiques sociales

  • La boutique, Perlette Petit – P.37
  • Un après-midi à «la boutique», Zubeide Iskender, Anouar Guelaiem – P.38

Regard sur les professions

  • Diplômes étrangers, John Ward – P.39
  • Moniteurs-Éducateurs…, Coordinaion Régionale des Centres de Formation – P.40
  • Le mouvement des correspondants, Catherine Charbonnier, P.41
  • Le travail social en colloque, Christina de Robertis – P.42

Arts et Cultures

  • Au risque de vous plaire sur grand écran, Guy Jouannet – P.43
  • Mégalopole, tag et Mégalomanie,  Étienne Racine – P.45

Rubriques

  • La revue des livres – P.46
  • Annonces – P.40

Edito

La revue Paroles et Pratiques Sociales change de forme. Douze ans après sa première parution, PEPS entend rester fidèle à ses objectifs initiaux : faire parler les travailleurs sociaux de leurs pratiques professionnelles et faire de la revue un lieu d’interrogations des mesures sociales souvent décidées d’en haut.
Quels que soient les thèmes à développer, il s’agit pour PEPS d’être un lieu de réflexions et d’échanges sur les décisions prises dans le champ du travail social et leur application sur le terrain.
Ce 45 ème numéro de PEPS consacré aux enjeux de la formation, se présente avec un nouveau rubricage et cette nouveauté vise plusieurs objectifs :
– répondre aux demandes des lecteurs qui souhaitent pouvoir davantage s’exprimer et par là-même, utiliser l’écriture comme mode d’auto-formation.
– répondre aux travailleurs sociaux qui, à la lecture descriptive et analytique des actions réalisées, cherchent à trouver du sens à leur investissement professionnel.
– répondre sur un plan rédactionnel, aux différents praticiens qui veulent assurer une large communication transversale entre les diverses catégories professionnelles de l’action sociale.
Le nouveau rubricage de PEPS confirme aussi la nécessité pour les travailleurs sociaux d’avoir une revue qui leur appartienne. La légitimité de cet outil découle d’au moins deux constats :
– l’absence de vision politique générale dans le travail social et pour les travailleurs sociaux.
– la naissance de plus en plus d’actions auto organisées par des populations démunies, ne trouvant pas de réponses à leur situation dans les mesurs sociales ou auprès des travailleurs sociaux (1).
C’est dans cette perspective qu’en réactualisant sa raison d’être, PEPS va publier systématiquement sa charte (2). Elle constitue sa carte d’identité.
Outre le dossier, les rubriques consacrée à la «Mémoire du travail social» ou «Rencontre avec…» peuvent nous servir de lien entre la parole et la pratique d’hier et aujourd’hui. Il s’agit de comprendre dans le temps et dans l’espace la mémoire présente de certaines actions dont la visivilité ne prend sens que si elles se situent dans leur contexte socio-politique.
Plusieurs rubriques telles que «Regard sur les professions», «Pratiques sociales», «Regard sur l’actualité» ou encore «Le travail social à l’étranger», peuvent compléter cette recherche du sens.
Qu’elles prennent la forme d’enquêtes de terrain, d’entretiens avec des acteurs sociaux ou d’autres initiatives rédactionnelles, l’accent sera mis sur le développement des démarches innovantes et des dynamiques à créer face aux situations sociales d’aujourd’hui.
Ces questions ne constituent-elles pas des enjeux de la formation ?

Mehdi Farzad

(1) On peut citer l’exemple des mal logés qui procèdent aux actions d’occupations des logements vides, ou bien de certains toxicomanes qui essayent de gérer leur situation par eux mêmes.
Voir aussi l’annonce du prochain numéro de PEPS consacré aux nouvelles solidarités…
(2) Voir la charte de PEPS en page 51

No 41 – L’inscription des pratiques sociales

L’écriture professionnelle comme expression autochtone et instrument de formation dans champ du travail social

L’ECRITURE EST TOUT D’ABORD UN TRAVAIL SUR SOI…

L’écriture traduit un projet. En écrivant on s’inscrit quelque part, on se projette. Les lignes directrices du texte s’enracinent dans un projet de vie. (1) Écrire est un effort pour coïncider avec soi-même, devenir soi, faire émerger des possibles ; R. Barthes traduit ce fait en disant que l’écriture « (…) n’exprime pas mais simplement fait exister (2)

Les travailleurs sociaux doivent effectuer un tel travail et non s’enfermer dans une action dont le sens risque finalement de leur échapper, une action que d’autres se chargeront d’évaluer de l’extérieur (politiques, psychologues, sociologues, et autres ethnologues du social). Produire du sens en s’exprimant à l’écrit sur sa pratique, au lieu de recevoir ce sens par l’intermédiaire d’un texte qui s’impose parce qu’il « fait autorité », c’est se servir de l’écriture comme d’un miroir devant lequel on peut reprendre confiance. (3)

…MAIS SURTOUT UNE PRATIQUE SOCIALE…

Le travail sur soi de l’écriture prépare aussi le travail en direction de l’autre, c’est donc une démarche qui implique immédiatement le TS dans un dialogue. En attestant durablement de la réalité de sa pratique, en l’inscrivant à travers une production permettant l’échange avec d’autres praticiens et les usagers, le travailleur social valide par là-même un travail personnel, le transmet et peut contribuer à une communication ascendante dont ses supérieurs hiérarchiques ont tant besoin.

…ET UNE STRATEGIE POSSIBLE POUR ETRE RECONNU ET CONSTRUIRE SON IDENTITE PROFESSIONNELLE

L’écriture, une condition pour affirmer une identité professionnelle (exercer un métier et en objectiver apparaît donc comme une démarche qualifiante possible pour la reconnaissance d’une pratique professionnelle ; en saisissant, capitalisant et formalisant l’expérience, il en exprime le sens pratique.

La représentation qui désigne celui qui écrit comme « autorisé » à le faire et comme devant être distingué de ceux qui méconnaissent les codes de la langue officielle (ceux qui ne maîtrisent qu’un parler populaire), est très forte et prégnante. L’enjeu, ici, ce n’est pas le discours savant pour lui-même, mais le sens des pratiques et codes sociaux qu’il commande et, du même coup, le fait de savoir ou non se situer, s’insérer dans un contexte social.

MODEECRITORAL
CATEGORIE SOCIO-PROFpsychologues,
sociologues, politiques
économistes dominants
Travailleurs sociaux
(dominés)
FONCTIONassistance idéologique (discours, modélisation)assistance sociale
(accompagnement)
CAPITAL CULTURELculture dominante (imposition idéologique)culture dominée
(reproduction de
modèles)
POUVOIR
SYMBOLIQUE
pouvoir de produire du
sens
aliénation et dépendance (sens reçu)
PRATIQUEScience
(Théorisation)
Techniques
(intervention sociale)
INVESTISSEMENTDistanceimplication
POSITIONspéculation sur
l’exclusion
TS avec les exclus
On voit, à l’aide de ce tableau que la position par rapport au pouvoir change selon que l’on se situe à l’écrit ou à l’oral

FAIRE ECRIRE LES USAGERS

Quant au travailleur social il a, de fait, un rôle d’écrivain public, il aide souvent les usagers à rédiger des formulaires administratifs, pourquoi n’irait-il pas plus loin en passant de l’animation des lieux de paroles à la création d’ateliers d’écriture ? (6)

L’accès à l’écriture est une démarche d’autoformation pour les TS (toutes catégories confondues et dans la perspective d’actions en transversalité) autant que pour les usagers. L’objectif : sortir de l’espace d’exclusion dans lequel ils se trouvent confinés les uns comme les autres. En s’autorisant à écrire, travailleurs sociaux et usagers s’engageraient dans la voie de la créativité et de l’innovation, seule valable dans le champ du social aujourd’hui, pour faire aboutir leurs revendications (7). S’ils restent à l’oral, leurs tentatives pour faire changer la profession resteront lettre morte.

Écrire et faire écrire : une pratique dont l’idée peut être exploitée dans un dispositif de formation aux professions du travail social. Il semble justement que la rédaction d’un mémoire soit pour nombre d’étudiants des ITS un véritable supplice (8) en ce qu’elle est perçue comme un devoir scolaire (avec sa connotation négative) et non comme un acte qui fait déjà partie d’une pratique professionnelle.

De plus, l’accès à l’écriture est accès au pouvoir(9), c’est donc une démarche essentielle, action sociale par excellence pour n’être pas dominé et exclus. C’est la stratégie d’un certain nombre de travailleurs sociaux consistant en une course aux diplômes -étages d’une fusée dont on ne voit plus la tête- pour échapper, en réalité, à la pratique, parce que, souvent, on ne la supporte plus.

Écrire pour ne plus pratiquer, est-ce possible ? Si cela « marche » c’est que l’on dissocie une même réalité en deux aspects qui la déforment : d’une part la pratique auprès des usagers, le travail « en relation », c’est là que les TS sont représentés « à l’oral » et d’autre part la conception, l’organisation générale, l’administration du travail social qui n’existe, de fait, que par la pratique, qui est une pratique, mais qui ne se donne, pudiquement, à voir qu’à l’écrit. Pratiques d’écriture et pratiques sociales devraient être reliées pour que disparaisse une inadmissible fracture.

CE OUI SE TRAME

Écrire, produire un texte, c’est aussi produire une texture sociale, un réseau à travers lequel une communication est facilitée. C’est, pour les travailleurs sociaux, une démarche d’autonomisation et de changement dans la mesure où précisément l’écriture est immédiatement possibilité d’action critique institutionnelle au sein même de la profession, ce que redoute parfois la hiérarchie qui adopte sur ce point une position plus qu’ambigüe : « On nous encourage vivement à écrire, nous confie une assistante sociale polyvalente de secteur, mais lorsqu’on s’exécute, que l’on donne un texte, il est mis au rancart ».

Cette démarche pour faire du travail social autrement ne peut que s’inscrire dans une trame qui est celle du projet professionnel (10) des praticiens. Encore faut-il qu’il puisse être reconnu, mais quand il le sera, la question de l’écriture se posera différemment car le rapport à l’écriture (dont nous proposons une illustration dans le tableau ci-dessous), sera également autre.

J.L. DUMONT

  1. C’est pourquoi lorsqu’on écrit, l’on s’y met ou, en d’autres termes, le désir d’écrire rend nécessaire la saisie du sens de son projet de vie sauf à voir les mots se dérober et ne plus avoir le sens qu’on veut leur donner, car les mots s’inscrivent dans la ligne directrice de notre projet, cf la notion de « mot significatif’ in : J.L. Dumont et M.C. Saint PE, Méthode du profil expérientiel, Lausanne, Far ed, 1990.
  2. R. Barthes, L’empire des signes, Flammarion, coll. Champs, 1970, p.106.
  3. cf l’entretien avec Laurence où elle exprime bien d’une part que les duifficulté d’écriture mettent en question la formtation professionnelle, les raisons d’un engagement professionnel possible
  4. cf JL Dumont, PEPS, n° 38, p. 6
  5. cf E.Auger qui établit cette distinction (PEPS, n°38, p.27)
  6. cf atelier d’écriture au foyer d’Alfortville, in : Le foyer communique, dans ce numéro, pp
  7. C’est en ce sens que M. Farzad, dans son édito, PEPS, n°38 sur les actions (grèves) menées par les TS, se posait la question : « Pourquoi les TS n’écrivent-ils pas ? »
  8. cf interview de Laurence Millet dans ce numéro et le petit poème de B. Marinoni, intitulé « Le mémoire ».
  9. Voir le tableau ci-dessous
  10. lequel n’est pas toujours très clair pour les usagers, comme pour praticiens eux-mêmes

No 41 – La formation des travailleurs sociaux écrire pour mémoire ?

(suivi par « le mémoire » de Béatrice MARINONI)

L’écriture professionnelle en travail social débute dès la formation. Quelle expérience en retirent les étudiant(e)s sortant des Instituts de travail social, quelles représentations en ont-ils et finalement quel est leur rapport à l’écriture ? C’est ce qu’il semblait nécessaire de demander aux intéressés, mais, en engageant la conversation sur ce sujet, on obtient aussi d’autres informations sur la profession.

« TOUT LE MONDE EST CAPABLE D’ÉCRIRE…

…et pourtant j’ai toujours été enfermée dans le rôle de quelqu’un qui avait du mal à écrire et je crois que ça reste longtemps. Par contre, dans une formation à l’expression écrite qui durait trois jours, une femme nous a démontré qu’on était capable de faire quelque chose et ça, je m’en suis souvenue.

Je crois qu’elle a réussi à mettre en valeur notre créativité, en fait, chacun à son niveau, elle nous avait fait faire des exercices, écrire une phrase sans « etc. » Elle nous avait intéressés avec R. Queneau. Elle m’a passionnée pendant trois jours et, à la fin, et je les ai gardé ces écrits-là, je les ai relus il n’y a pas longtemps et je me suis dit c’est génial I Elle était arrivée à faire que je sois contente de ce que j’avais écrit, pour la première fois…

En ce qui concerne mon mémoire, je ne suis pas trop mécontente de ce que j’ai écrit, je ne sais pas ce que ça donnera, mais je pense que c’est un bon point : on est plus capable de soutenir quelque chose quand on est content. J’ai eu du mal pour le premier mémoire, je ne l’aimais pas ce mémoire, ça ne m’a pas plu, j’ai travaillé contre le sujet, je l’ai détesté ce mémoire !

ON EST RECONNU PAR L’ÉCRIT

Je me sens plus à l’aise à l’oral. Justement une AS me disait qu’une grande majorité des travailleurs sociaux ont énormément de problèmes d’expression écrite et s’accomplissent énormément à l’oral ; ils parlent beaucoup et écrivent peu. Je pense qu’ils ont des bonnes idées, enfin « ils ont », ce matin je me suis dit : on pense « les assistants sociaux », en fait on est tous différents, c’est une façon de parler et de classer. Il y a des idées, mais elles restent en l’air et sont récupérées. J’ai ce sentiment-là, c’est justement le blocage de l’écriture. Il y a aussi l’angoissante question « comment faire ? » et puis, dans le social, on est peut-être plus dans la réflexion que vraiment dans l’agir. Je crois que ça se sent bien dans les relations humaines, les revendications. C’est vrai que lorsqu’on se revendique on est reconnu par l’écrit. Je pense qu’aujourd’hui le travailleur social n’est pas reconnu parce que ce ne sont que des paroles et pas des écrits

Quand je regarde la formation, les amies qui étaient dans ma promotion, il n’y en a pas beaucoup pour qui ça a été simple d’écrire, on l’a tous plus ou moins décrit comme une horreur, comme une chose très difficile.

J’ai discuté avec des troisièmes années que je ne connaissais pas tellement l’an passé. Ils sont venus me voir en me disant : « ça y est c’est recommencé, tu l’as refait ! » Je me suis rendu compte qu’ils avaient exactement le même effet panique que moi. Qu’est-ce qu’un mémoire, C’est quoi cette bête-là qui doit faire à peu près cinquante pages ? On nous dit qu’il faut démontrer quelque chose, mais en définitive on ne peut pas non plus mettre « je », quelque chose qui reste quand même assez flou.

PRENDRE PLAISIR

Pour réussir un mémoire avant tout il faut l’aimer et il faut prendre plaisir à le faire. Dans le cas contraire je pense que ça ne donne pas de résultat, en tout cas, le résultat dont on a envie. La preuve en est que mon premier mémoire, je l’avais commencé en décembre, je l’ai fini en mai…avec quatre kilos en moins ; ça a été très mal, ça a été la crise d’identité professionnelle et personnelle. Et là, je n’ai pas repris une seule ligne de l’ancien mémoire et c’est vrai que j’ai commencé le premier écrit le 2 septembre et donc je l’ai rendu en un mois et dix jours, j’ai écrit cinquante pages, alors que pour l’autre j’ai mis quatre-cinq mois à en écrire trente-cinq et encore j’avais tiré…Ce qui me fait dire que, quand on aime quelque chose, ça marche ! Quand on sait surtout pourquoi on le fait et quand on sait à quoi ça ressemble aussi.

J’ai eu le sentiment de manquer de soutien pour le premier mémoire. A l’institut, on a quinze heures et un formateur. Et moi je leur avais dit que l’idéal c’était d’avoir sept heures avec un formateur pour une formation théorique et sept autres heures où, en fait, on pourrait discuter de la façon dont on voit son mémoire

PROJET D’ECRITURE PROJET PROFESSIONNEL, CE A QUOI SERT LE MÉMOIRE

Est-ce que, effectivement, on a un véritable projet avant d’écrire un mémoire ?Je pense que j’en n’avais pas. C’est clair, avant d’écrire le premier mémoire je n’avais pas de sujet, il n’y avait rien qui me passionnait vraiment, ça a déclenché, d’ailleurs, certaines questions. Je n’avais pas de projet d’écriture pour le mémoire et surtout, je ne savais pas ce que je voulais, ce que je voulais faire à travers cette profession-là.

Finalement je n’ai pas eu ce premier mémoire et j’ai été déçue parce que c’est vrai que, quelque part je comptais sur la chance et puis j’avais tout de même fourni un certain travail je veux dire sur 35 pages tout n’était pas bien mais tout n’était pas mauvais non plus. Je me suis donné une échéance pour prendre une décision : soit j’arrêtais ma formation, soit je la continuais, je crois que de toutes façons ça devait passer par là. Et j’ai décidé de continuer, mais j’ai surtout décidé de laisser derrière moi l’ancien mémoire, pas en annulant complètement ce qui s’était passé parce qu’au contraire je m’en suis servi pour l’autre, mais je me suis dit : je sais pourquoi je vais continuer, je sais à quoi va servir mon mémoire et je ne me suis plus posée de questions à ce moment là

CE OUI FAIT QU’ON ÉCRIT : LA CONFIANCE EN SOI

Je crois que j’ai repris confiance. Ce qui m’a aidée, c’est que j’ai lu d’autres mémoires et je me suis rendue compte que les gens écrivaient d’une façon relativement simple avec un point, on retourne à la ligne, on dit une autre idée et j’ai essayé, en fait, de clarifier ce que je pensais et forcément de clarifier ce que j’écrivais.

J’ai clarifié ce que j’écrivais à partir du moment où je clarifiais ce que je pensais et surtout, j’avais quelque chose à dire parce que je pensais quelque chose. L’écriture arrivait comme le prolongement de la pensée, alors que jusqu’à présent j’avais des pensées, mais elles s’arrêtaient à un moment où je ne devais pas avoir envie de le dire, je ne communiquais pas, ce n’est pas facile à exprimer…

CE QUE REPRÉSENTE LE MÉMOIRE : UN POINT DE DÉPART DANS LA VIE PROFESSIONNELLE

Le premier ressemblait à un outil qui me permettait d’avoir un diplôme, le deuxième ressemble à un écrit qui reste et qui peut servir d’autres, qui peut servir de point départ. Un écrit où il y a des idées qui sont les miennes, qui sont écrites à ma façon avec une orientation qui est la mienne, mais qui peut servir de point de départ pour quelqu’un qui n’en a pas. Un écrit qui reste une trace, alors que le premier, pas du tout. Le premier, c’était un mémoire que l’on me demandait de faire et qui devait rassembler quelques pages pour avoir un diplôme

Je pense qu’il faut écrire quelque chose qui, d’un point de vue professionnel, peut avoir de l’intérêt et à côté, faire une formation qui soit plus en rapport avec l’institut.

ÊTRE PUBLIÉE

J’ai le souvenir, dans un colloque, d’une fille qui avait écrit un mémoire en rapport avec un projet sur le lieu de son stage et son mémoire avait été primé. Je pense qu’il est bien de savoir que son mémoire ne va pas être mis sous une pile et puis, en définitive, jamais consulté, parce que dans un mémoire, on y met des choses du temps, on y met du cœur, on y met de la haine, on y met, en tout cas, de soi.

Faire un article, ça me plairait bien. On avait un peu fait cette démarche avec le projet Tchécoslovaquie. On avait eu de l’argent par les ASH et, en contrepartie, on devait leur renvoyer un article, ce qu’on a pas fait. Je le regrette parce que c’était quand même le projet de départ et on ne l’a pas réalisé, c’est pas sympa. Il faut voir aussi que, généralement, on démarre un projet à 6 comme on l’a fait, que le voyage c’est la carotte et que lorsqu’on a mangé la carotte, généralement on ne se retrouve plus qu’à deux. Donc écrire le projet et en plus, écrire un article d’ASH, ça faisait beaucoup, surtout au moment où on démarrait le mémoire ! C’est aussi un concours de circonstances mais, par rapport à ce que j’ai vu en Tchécoslovaquie, j’avais beaucoup de choses à dire Moi je trouverais ça génial d’être publiée pour donner des orientations aux autres. J’ai le souci de communiquer ce que je vois, ce que je fais pour avancer et en même temps aider certains à un moment donné

EN COULISSE DU MÉMOIRE…

J’ai été énormément choquée, quand je suis allée à la DRASS passer ma « situation sociale ». Il y avait une femme qui s’est mise à discuter avec un collègue, devant moi, comme ça, je ne la gênais pas a priori, elle lui a dit : « Je suis embêtée, je n’arrive pas à fourguer un mémoire ; je l’ai proposé à une psy, elle ne voulait pas, je l’ai proposé à une AS, il a fallu le lui envoyer mais comme c’était la fin du week-end, elle n’en voulait plus il a fallu aller le rechercher ». Je me suis dit : il est où, le respect du travail, il est où, dans ces conditions-là ? J’ai été outrée de voir qu’on n’en tient pas plus compte que ça.

J’ai discuté avec une amie et je me suis rendue compte que les 3ème années on a tous des sujets qui se ressemblent et une entraide est possible : tiens, tu devrais voir intel qui a fait son sujet là-dessus, regarde sa bibliographie, regarde son orientation ! ou : tiens, tu parles de sa conclusion, va voir ce qu’il en pense ! En définitive, ce qui se passe, quand tout le monde a eu son diplôme : on fuit l’Institut. Il y en a même qui sont venus rechercher leur mémoire, c’est peu dire….

Je crois qu’on a tous besoin, à un moment donné, que celui qui a fait un mémoire avant nous et qui a une orientation et une bibliographie en rapport avec ce qu’on fait, et nous en informer, mais je crois qu’il y a un côté très protectionniste part rapport à ce mémoire.

ÉCRITURE COLLECTIVE ?  QUELLE SOLIDARITÉ ENTRE ETUDIANTS ?

Je sais qu’une amie avait fait son mémoire de psychologie, sa licence : elle l’avait fait avec une copine , je pense que c’est rassurant, je pense que c’est même bien ! parce qu’il n’y a pas simplement son enjeu , mais il y a l’enjeu de l’autre, je pense que c’est bien.

Par contre, à l’Institut, je n’ai pas travaillé une ligne avec des gens. Je suis incapable de dire de quoi traite le sujet d’une fille de ma promo qui a été recalée comme moi sur le même thème. Pourtant j’ai eu l’occasion de parler un peu avec elle : sur quoi travailles-tu ? Et je n’ai jamais eu de réponse. Je sentais bien que c’était « son travail », « me pique pas mes idées ! » J’avais l’impression de me retrouver à l’école primaire, des fois que ses propres idées fassent progresser les autres, vous vous rendez-compte ! J’ai senti la formation comme un véritable individualisme, surtout pour le mémoire, à un moment où on pourrait penser qu’on a vraiment tous besoin des autres.

MAL ÊTRE DANS LA PROFESSION

En écrivant mon mémoire, je me suis positionnée, par rapport à la profession, seulement je ne savais pas si j’allais continuer ou arrêter parce que j’ai été souvent agacée par tous ces travailleurs sociaux qui râlent, qui râlent, qui râlent à propos d’une profession et qui, en définitive, l’exercent quand même.

Et cette profession elle n’est pas à crier dessus parce qu’en fait, elle les fait vivre c’est une source alimentaire (pour les travailleurs sociaux comme pour les usagers) et j’ai fait le pari d’être cohérente avec moi-même. Je vais avoir mon diplôme, je vais exercer cette profession-là, mais je l’exercerai avec le sourire et je crois que dès que je commencerai à être revancharde et désagréable, j’essaierai d’arrêter et de faire autre chose parce que je pense que les usagers sont des gens qui, la plupart du temps, viennent chercher une aide, quelle qu’elle soit et trouvent en face d’eux des gens complètement dépressifs dans leur façon d’être et de faire. Donc par rapport à ça c’est par respect et puis, deuxièmement, c’est une profession qui ne peut ne plus correspondre à une personne à un moment donné. Je crois que les assistants sociaux ronchonnent pas mal de leurs conditions et sont dans le paradoxe justement de ne rien faire pour ; c’est vraiment la solution de facilité. Il y a une dignité qui fait qu’on part parce que ça ne correspond plus, on arrête.

Comment peut-on être dépressif dans une profession où, en plus on démoralise les stagiaires ? On risque de communiquer un désarroi total aux autres. A un stagiaire, c’est pas trop grave, mais à une famille je trouve ça honteux. Je me sens concernée par les problèmes de société, mais de plus en plus aussi par les problèmes de statut, de reconnaissance.

CRISE, RUPTURE, QUELLES SOLUTIONS ?

Je crois que plus on se dit qu’il y a une crise, plus en fait, on trouve la solution facile de dire : « oui mais on est en crise » mais en définitive on est toujours au résultat et aux causes et je pense que pour une situation, par exemple ou une famille en difficulté, les résultats c’est effectivement un point de départ mais le but, c’est quand même de régler la cause, je pense que par rapport à la problématique de la reconnaissance des travailleurs sociaux et leur façon de travailler, je pense qu’une fois de plus, il faut arrêter de crier sur les résultats et voir la cause. Et c’est pour ça, cette fameuse crise d’identité, je pense qu’elle est plus complexe que ça, c’est sûr, mais je pense que c’est aussi facile de se dire qu’on est en crise et de se cacher derrière ça et de ne rien faire non plus !

Je n’ai pas l’impression justement que cette « crise » est appréhendée comme une rupture mais comme un long état qu’on gère et dans lequel on se trouve, tout compte fait, bien parce que ça nous permet de justifier les choses qu’on ne fait pas. C’est un truc complétement bizarre et moi je ne m’y reconnais pas. Alors je pense que je vais être vraisemblablement malheureuse dans les services dans lesquels je vais tomber, mais je me dis tant pis…

PERSPECTIVES PROFESSIONNELLES

Je vais avoir un poste en polyvalence de secteur. Moi qui ne voulait pas en faire, je m’y retrouve. J’avais l’impression que c’était ce qui me déplaisait le plus, en fait, c’est ce qui m’a le moins déplu. La polyvalence de secteur c’est peut-être là que j’arriverais à tenir ma place par rapport à moi-même.et par rapport aux usagers aussi et après, je pense, je me sens beaucoup plus proche de la formation : essayer de faire passer des choses que j’ai ressenties. Et sur le mémoire, par exemple, des crises à certains moments, sur l’écriture, sur les grandes questions, sur la profession, si on a envie de la faire, si on a un projet, faire remonter plein de choses…

Il me semble avoir compris en fout cas pas mal de choses par rapport ma non-réussite et ça, j’ai envie de le communiquer. Ce que je disais aux Sèmes années : reste encore la difficulté qu’on est, chacun, complètement différent, la façon de vivre les choses avec une personne ou toute seule. Comme je suis, avec mes qualités et mes défauts je l’ai vécu comme ça, j’ai ressenti ça, maintenant chacun s’y retrouve ou s’y retrouve pas.

En recommençant le mémoire, j’ai eu l’impression d’avoir retrouvé justement le but Quand on vit quelque chose à fond et on en reste pas à la conséquence et quand on fait un travail sur le pourquoi du comment, un cheminement par rapport à ce qui s’est passé, et bien ! Je pense qu’on a appris plein de choses et qu’à partir de ce moment-là on peut en faire bénéficier les autres. J’essaie d’expliquer avec le plus de précisions, parce que, ça aussi, il m’a semblé que les TS parlent d’une façon très très vague et quand on veut se faire reconnaître, il faut être très très pointu et faire attention à son vocabulaire. Et c’est pour ça qu’en discutant avec les Sème années je crois que j’ai essayé d’être très précise, d’employer un mot plutôt qu’un autre. Quand je voyais qu’ils essayaient d’interpréter à leur façon un mot je leur donnais la représentation du mot que j’employais et c’était génial !

-C’est déjà un travail d’écriture ça !

-Mais complètement ! Je crois que j’ai senti le déclic : chacun ne met pas les mêmes choses derrière un mot, je crois que l’important justement c’est que l’écriture fasse corps avec le réel’.

Laurence Millet *

Propos recueillis par Jean-Luc Dumont

* A.S. en polyvalence de secteur. Vient d’obtenir son diplôme. Pour toutè réaction ou demande d’information, écrire à PEPS qui transmettra.

Le Mémoire

  • 6h00 du matin, le réveil sonne… Mon mémoire !
  • 7h30, je monte dans le train… Mon mémoire !
  • 9h00, MONTROUGE…Salut les copines ! Votre mémoire !?
  • 12h00, Direction la cafétéria… Mon mémoire !
  • 16h30, A demain les copines, Bossez bien…Votre mémoire !

Et c’est ainsi pendant des mois et des mois…

Métro, boulot, dodo ? NON, NON…

Objet, Problématique, Hypothèse !…

Crises d’angoisse : j’y arriverai pas.

Bouffées d’espérances : j’y arriverai !

Qui va le taper ? Je tape…Non je ne pourrai pas !

Oh ! Et puis si…Et puis non, je le ferai taper !

Bon, j’en suis pas encore 1â !

2h00 du mat, cauchemar : recalée au D.E.

Mauvais rêve. J’y suis pas encore !

50 pages…Il faut que j’écrive 50 pages !

On sort ce soir ? Tu rigoles ! Faut que je pense au mémoire !

Oh ! Horreur : avril… faudrait peut-être que je m’y mette ! ! !

Béatrice MARINONI

A.S. 3ème année

No 41 – Ce qu’écrire peut vouloir dire

Si l’écriture professionnelle ou administrative est inscrite dans les habitudes des travailleurs sociaux, écrire sur sa pratique ne fait, en revanche, par partie de leur habitude. Cette difficulté d’écrire, déjà ancienne, peut être comprise à la fois comme un symptôme majeur de notre profession et comme ultime recours de sa survie. En effet, la reconnaissance passe aussi par une connaissance pratiquo-théorique, sur laquelle s’appuient les pratiques professionnelles.

DE LA DIFFICULTÉ A ÉCRIRE

Affirmer la difficulté à écrire chez les travailleurs sociaux ne permet pas d’en dévoiler les raisons. Une des premières causes semble être liée à l’économie même du savoir dans le champ social.

Les conditions d’acceptabilité de l’écriture sont effets indissociables de l’acte d’écrire ; « apprendre un langage, c’est apprendre que ce langage sera payant dans telle ou telle situation » (1). Dès lors, l’écrit peut devenir un support de l’action, un amplificateur qui lui donnera une assise et un fondement.

La recherche action dans le travail social est encore, pour la majeure partie, des productions d’acteurs qui ne sont pas des travailleurs sociaux ou qui ne le sont plus (car acquérir une compétence supplémentaire pour le travailleur social passe souvent par une sortie de sa profession) . De plus la coopération acteur chercheur installe insidieusement, tant chez le travailleur social vis à vis de « l’expert » que chez l’usager vis à vis du travailleur social, le sentiment que pour ces premiers, leur propre parole est en quelque sorte volée et qu’ils sont trahit par l’usage qui en est fait (2). Cette rivalité silencieuse sur la légitimité d’intervention renforce peut-être la conviction du caractère vain de la réflexion (3).

Dépasser ces appréhensions et transformer ces représentations « vampirisantes » autour de paroles déformées, nécessite une éthique de l’écriture qui passe d’abord par une restitution aux acteurs concernés de la production écrite. L’écriture n’étant pas une fin en soi, mais un prolongement d’une réflexion ou d’une recherche.

Elle devient alors une écriture instituante, c’est-à-dire un outil ou un support d’échange destiné à faire évoluer la pratique professionnelle.

Cependant, force est de constater qu’il y a conne un effet de censure sur le travailleur social qui intérioriserait l’irrecevabilité de sa production écrite comme n’étant pas celle exigée par les contraintes du « marché ». C’est comme si ce qu’il pouvait dire n’était pas une parole « autorisée » ou « d’autorité » (1) qu’il ne pourrait pas soutenir face à d’autres partenaires. L’écriture dépend, dès lors, du marché dans lequel elle s’inscrit et soulève des multiples enjeux et des logiques parfois opposées (économique, politique ou économique) qui viennent imposer une production écrite « instituée ».

Une des questions que l’on peut se poser, est celle de la reconnaissance de l’écrit par celui qui le lit. Si un des objectifs de l’écriture, c’est de transmettre quelque chose afin d’engager un échange, est ce que l’écrit du travailleur social sur sa pratique ne s’adresse-t-il pas en fin de compte, non pas à d’autres travailleurs sociaux, mais à ceux qui étudient le travail social ? Répondre à cette question supposerait que l’on dispose d’éléments sociologiques sur la culture des travailleurs sociaux et leur rapport à la lecture.

L’ambition de la revue Paroles et Pratiques Sociales est que les productions écrites puissent être un outil de réflexion et d’auto-formation pour ses auteurs et aussi pour les lecteurs.

UNE TRANSGRESSION NECESSAIRE

Choisir d’écrire sur sa pratique professionnelle, c’est s’inscrire dans une rupture par rapport aux traditions professionnelles (Cf tableau de l’article de J. L. Dumont dans ce même numéro) car le travailleur social est bien souvent dans un rapport de soumission ou d’aliénation vis à vis de ceux dont il tire les principes explicatifs de sa pratique.

On pourrait se poser la question de la nécessité d’écrire car en fin de compte si cette transmission orale se pérennise, c’est qu’elle recouvre peut être des enjeux ; l’un d’entre eux est l’empirisme et le pragmatisme de l’expérience dont le travail social, par la construction de réseaux d’information et d’informateurs, constitue un capital qui devient un réel pouvoir(4) pour celui qui le détient et le contrôle.

L’ECRITURE, UN ENJEU PROFESSIONNEL

De la nécessité d’écrire à l’acte d’écrire, il y a un pas qui est souvent difficile à franchir ;si les gains narcissiques n’échappent à personne, les retombées symboliques s’épuisent à court terme.

L’intérêt de l’écriture, c’est qu’elle s’inscrit dans une démarche conscientisante (5) car elle peut permettre une évolution de sa propre pratique, qui éclaire à son tour la place d’où l’on parle ; place qui pose la question d’une action sociale au service de qui : l’institution, l’usager ou le travailleur social ?

L’écriture, en laissant une trace, permet d’interroger l’expérience professionnelle et de redonner un sens nouveau à l’action. C’est une réappropriation de sens qui s’opère, caria distanciation qu’elle impose aide à formuler ses propres interrogations et introduit une démarche de conceptualisation dans le dispositif d’intervention.

L’écriture est aussi un espace de création et de sublimation, non pas d’un discours mais d’une parole « incarnée » qui s’appuie sur sa propre pratique.

Cette entreprise, aussi séduisante et passionnante soit-elle comporte cependant des risques ; celle d’accroître parfois des doutes, de rencontrer des blocages ou des empêchements de la pensée, car interroger les fondements, la finalité ou la pertinence de ses outils professionnels demande une vigilance aiguisée. De plus, les multiples dimensions des situations sociales nécessitent l’utilisation de concepts appartenant à des domaines « supposés étanches » mais « nécessitant de fait une investigation transdisciplinaires » (6).

Écrire, c’est construire une mémoire et permettre l’inscription des pratiques sociales ; c’est aussi s’inscrire dans une démarche de théorisation d’un savoir faire (7).

L’écriture devient alors un enjeu professionnel nécessaire car c’est en participant à la construction de ses propres outils, que le travail social pourra sortir de sa position de dépendance et construire ainsi son propre espace de pensée.

LES EFFETS DE L’ECRITURE

Comme nous venons de la voir, écrire est une démarche de sens qui implique une certaine transgression qui s’accompagne de la nécessité pour celui qui écrit, de rendre compte et de témoigner de sa pratique. L’acte d’écrire s’inscrit donc dans une dynamique de l’échange.

Ace titre, on peut tenter de classer les effets de l’écriture dans ce qu’elle produit sur le sujet pensant.

  • L’écriture est d’abord productrice de sens ; en interrogeant sa pratique, elle permet de la féconder et de lui donner un sens « en la rendant visib1 e et lisible par tous. – Elle produit de l’identité, car écrire s’est se dire, c’est se signer par rapporta l’autre qui va me lire. De fait, l’écriture agit sur celui qui écrit en lui redonnant confiance sur sa capacité d’agir sur son environnement.
  • L’écriture agit comme un mode d’évaluation de soi-même et de son travail.

Dans la mesure où elle agit comme un effet de miroir sur sa propre place.

  • L’écriture induit un travail de transformation de soi dans la mesure où je puise dans mes propres ressources et dans mes propres capacités pour écrire.
  • Si l’action ne se suffit pas à elle-même, c’est par ce qu’elle est d’abord produite, puis enrichie par la réflexion écrite. L’écriture est donc un prolongement de l’action et inversement, la pratique apparait comme un prolongement de la réflexion, entendue comme une action qui se réfléchie.
  • Enfin, quand l’écriture dépasse l’évaluation d’un savoir, pour devenir un acte libre que je pose, alors l’écriture peut être productrice de liberté.

Elle est une démarche conscientisante.

La revue PEPS tire une de ses originalités dans le fait que l’approche rédactionnelle permet à tout travailleur social qui le désire d’exprimer son point de vue, éclairé dans sa construction par les questions des membres du comité de rédaction.

L’idée que la parole de chacun est importante et peut être lue n’est pas seulement un projet ou une utopie. C’est déjà une réalité au travers de la revue PEPS et c’est chaque jour, un peu plus vrai quand on prend la peine d’écrire et de tendre la plume à ceux qui la veulent !!! Écrivons, c’est une urgence.

Éric AUGER

  • Bourdieu P., « Ce que parler veut dire » dans QUESTIONS DE SOCIOLOGIE, Ed. Minuit, 1984, p. 95 à 120.
  • Cette hypothèse de la légitimité à parler sur le travail social reste à vérifier.
  • Cf article d’E. Auger, in PEPS N° 39 « l’écriture chez les travailleurs sociaux ».
  • Crozier M., et Friedberg E., L’ACTEUR ET LE SYSTEME, Ed. Points, 1977. Les auteurs parlent de « zone d’incertitude » comme enjeu de pouvoir dans les négociations.
  • Paolo F., La pédagogie des opprimés, Ed. Payot, 19…
  • Déconstruire le social, seminaire I dirigé par Sad Karsz Ed. L’Harmattan, Cahiers de Pratiques sociales, 1992.
  • Deux articles parues dans les ASH le 21/2/92 « Assistantes sociales, une crise symbolique » par Verda et Mondolfo et le 24/1/92 « Le travail social, l’avenir d’une crise » par Chauviere, Chopart et Bachmann, affirment, chacun à leur manière la nécessité de capitaliser les savoirs faire et d’un « ressourcement en légitimité ».

No 21 – Sommaire / Edito

Formation initiale des travailleurs sociaux

Sommaire

Économie Sociale

  • LES RÉGIES DE QUARTIER par Claudine DUSSOLIER. Des lieux d’expressions et d’échanges pour améliorer les relations sociales et le cadre de vie.

Travail social à l’étranger

  • LA FORMATION AU TRAVAIL SOCIAL AU CANADA FRANCOPHONE
  • par Michel TALEGHANI. Elle réussit à allier haut niveau théorique et implication dans les pratiques professionnelles

Relation Éducative

  • APPROCHE SYSTÉMIQUE EN TOXICOMANIE par Odette TOULET
    CASTERA et Phillippe BOURGLAN
    La famille érigée en système.
  • LES PROFESSIONNELS DE LA RELATION : RÉPONSE A TOUT ?
    par Simone Chatelard.
    La relation thérapeutique pour une AS d’entreprise.

Dossier

FORMATION INITIALE DES TRAVAILLEURS SOCL4UX Sur le
parcours, de la sélection au diplôme, de nombreuses questions se posent.

  • LA SÉLECTION : UN PARCOURS SEMÉ D’EMBUCHES, par Yvonne SARRAT
  • LA FORMATION OU MIETTES DE SAVOIR ? par Augusta EPANYA
  • LA VALEUR MARCHANDE DES DIPLOMES par Éric AUGER
  • MENACES SUR LE TRAVAIL SOCIAL… ESPRIT ES-TU LA ? par Philippe MOUGEL

Le jeu de l’interview

  • COMMENT EN PARLER ? Interview de Gérard CHABAUD (Association Drogue & Société) par Daniel TARTIER

Actuel

  • PEPS ÉTAIT PRÉSENT AU 8ème CONGRES DE L’ASSOCIATION NATIONALE DES INTERVENANTS EN TOXICOMANIE par Sylvie CATONA et Philippe BOURGLAN

Libre expression

  • UNE HISTOIRE ORDINAIRE par Odette-Anna TOULET

Edito

OBJECTION DE CONSCIENCE
Dans les pays pauvres appelés pudiquement « en voie de développement », l’arme la plus acérée pour tailler dans le lard des énormes inégalités, de la corruption, des petits et grands pouvoirs, se nomme… SAVOIR. Le savoir est subversif parce que libérateur ; confronté à la pratique du quotidien il apporte la conscience. Ainsi là-bas, les travailleurs sociaux ont appelé leur action, « conscientisation ».
Il s’agit de créer l’École pour ceux qui en ont été exclus en partant d’une autre : celle de la vie. Des faits, des paroles, des gestes de tous les jours sont restitués dans un contexte social, économique, politique. Les visages de l’oppression apparaissent, avec eux la volonté de les combattre en entrant dans un rapport de forces.
Dans les pays riches appelés étrangement « développés », le savoir est une question de spécialité, l’école une affaire de marché, l’universalité de la conscience n’est pas rentable donc tout aussi dangereuse.
Les travailleurs sociaux en formation légitimement s’interrogent. Ils se posent la question si à l’école, on ne les mène pas en bateau : justement là où le savoir pourrait atteindre sa pleine signification, il semblerait que tout le monde esquive les questions et ‘quitte le navire.
Difficile pour l’étudiant devenu professionnel, de provoquer à son tour chez les usagers du travail social une prise de conscience. Mais après tout, il ne lui est pas demandé de jouer au Che Guevara des banlieues, simplement d’être un bon technicien de la relation d’aide.
Conclusion : il faut que les élèves conscientisent leurs forma-teurs sur la situation d’oppression qu’ils reproduisent !
Hugues BAZIN

No 03 – Sommaire / Edito

Sommaire

Edito P 3

Paroles aux livres p 4

Petites annonces P 5

DOSSIER : «Quelles formations pour quels travailleurs sociaux . . . p 5 à 12

ÉDUCATION SURVEILLÉE : Il reste encore des verrous à faire sauter p 13 – 14

Psychiatrie ou mort de l’objet social en Psychiatrie p 15

La vieillesse au risque de l’écologie p 16

D’DASSISTANCE GAIE p 17

Le M.A.S p 18

Droit à la famille et cité de promotion familiale . . p 19

Les T.S. et les femmes prostituées p 20

Echos – Chaos p 21

Droit de réponse à la CGT p 22

Jean-François BATELIER p 23

Edito

Beaucoup de nos amis lecteurs se demandent qui sont les personnes derrière les signatures. Légitime ques¬tion sur laquelle nous allons nous exprimer.

Les premiers numéros de PEPS ont été réalisés par le collectif Région Parisienne, avec des collaborateurs exté-rieurs.
Aujourd’hui d’autres groupes ou collectifs se mettent en place et vont pouvoir progressivement prendre toute leur part dans la conception et la réa-lisation de la revue.

Pourtant notre objectif demeure toujours l’ouverture, la participation le dialogue le plus large possible entre Travailleurs Sociaux des différents sec-teurs, ce qui n’est pas encore le cas.

Le Collectif Région Parisienne étant actuellement majoritairement composé d’Assistant(e)s Sociaux, les autres aussi d’ailleurs, nous avions jugé plus «tactique», pour ne pas hypothé-(fuer le caractère ouvert de la revue, de ne pas mentionner le secteur d’activité des auteurs d’article afin de ne pas positionner le journal, dès le départ, comme une revue d’AS ce dont nous ne voulions absolument pas.
Position qui nous est apparu à la longue intenable pour au moins deux raisons :

— l’absence d’identification des auteurs d’articles… on n’est pas des fantômes et quand on s’ex¬prime c’est bien à partir d’une place dans la division du travail social, en fonction d’une pratique qui fourni une expérience singu-lière et donc un point de vue par-ticulier sur les phénomènes ou les situations.

— le risque que n’apparaissent signés et situés que les articles d’acteurs périphériques au champ social alors que notre objectif est bien de mettre en avant les paroles des Travailleurs Sociaux.
La décision est donc prise de si-tuer nos articles ce qui leur donnera, nous l’espérons, encore plus de saveur.

L’élargissement des collectifs et de la revue aux autres secteurs du travail social reste à l’ordre du jour, alors n’hésitez pas à faire circuler très large-ment la revue pour qu’elle devienne toujours davantage un outil de paroles et de débats entre tous les Travailleurs Sociaux.