La diffusion de nouveaux usages de la culture matérielle, qui donnent une « deuxième vie » aux objets, suppose l’acquisition ou la réappropriation de savoirs faire particuliers, des changements de pratiques quotidiennes mais aussi des glissements, si ce ne sont de véritables renversements, au sein des systèmes de valeurs portés par les sociétés industrialisées. Des thèmes de questionnement et de recherche, qui avaient été délaissés des sciences sociales.
séance de l’Atelier « Deuxième vie des objets », EHESS, Paris
Delphine CORTEEL, Maître de conférences, Laboratoire REGARDS – Université de Reims Champagne-Ardenne, « Enquêter sur le faire, faire avec et se faire embarquer. Récit d’une enquête dans une association du secteur de la réduction des déchets »
Entrée libre
Adresse : EHESS-Paris, 54 boulevard Raspail 75006 Paris
Séminaire animé par Fanny RASSAT (doctorante LADYSS, Université Diderot Paris VII), Jeanne Guien (doctorante CETCOPRA, Université Paris I Panthéon-Sorbonne), Élisabeth Anstett (Chargée de recherche CNRS, IRIS), Nathalie Ortar (Chargée de recherche MEEM, LAET).
Plus d’information sur le programme 2017-2018 et les activités de l’Atelier sur le site : http://dvo.hypotheses.org/
Comme le dit Mudano de Pimp My carroça « les collecteurs de rues sont des super héros de l’écologie qui ont le pire des super pouvoirs : l’invisibilité ». Les ordures sont des choses que l’on emmène loin de la vue le plus vite possible, et ceux qui vivent de la collecte sont déconsidérés socialement ou ignorés malgré le service essentiel qu’ils pourvoient.
Face à l’évidence des défis écologiques et socio-économiques, la société a commencé à valoriser les entrepreneurs de l’économie circulaire qui sont mis à l’honneur dans les médias et les conférences. Mais les collecteurs qui par choix ou par manque d’alternatives se sont tournés vers la collecte informelle et qui sont un maillon essentiel du recyclage et du réemploi sont au mieux tolérés, au pire combattus au nom de débordements possibles et faute de la visibilité d’un impact positif passé sous silence.
Pourquoi mesurer l’impact ?
Les collecteurs informels de Bogota font économiser à la collectivité plus de 60 millions de dollars annuels de coûts de traitement
Des lieux parmi les plus emblématiques de Paris comme les puces de Saint-Ouen et les Bouquinistes des bords de seine ont été créé par les biffins
Au Brésil, 90 % des matériaux qui sont recyclés ont été collectés par des biffins et auraient finis en décharge
Il est des éléments chiffrés et tangibles que l’on peut lister en traversant les époques et les pays qui permettent d’attester de l’impact réel apporté par une profession, de déconstruire des mythes et de trouver des pistes de progrès. Suite à l’élaboration d’une méthodologie d’impact environnemental, Future of Waste a décidé d’aider l’association Amelior à lister, localiser, mesurer ce qui fait le quotidien de la biffe Francilienne : les biffins, les lieux de collecte, de stockage, de vente, de répression, les coûts générés ou évités, les impacts sociaux économiques, culturels et écologiques . Ce travail s’inscrit dans une démarche de long terme soutenu par le collectif rue marchande qui vise à mieux faire comprendre cette activité ancestrale auprès des collectivités et du grand public.
Quel est le périmètre ?
On peut retenir comme définition des biffins : les personnes ayants une activité marchande de revente d’objets usagers qui proviennent de la récupération suite à un abandon, un don ou un échange, vendus en l’état ou revalorisés. Du mot « biffe», crochet avec lequel le chiffonnier fouillait les détritus. D’où « biffins » qui désigne les récupérateurs vendeurs. La réalité est beaucoup plus complexe et recouvre de très nombreux paramètres qui sont détaillés dans cette étude. Dans le cadre de l’étude de mesure d’impact on s’attachera à étudier
Les biffins qui récupèrent dans les encombrants, de main à main, dans les ordures ménagères, les fins de brocantes ou de vide greniers puis qui revendent sur le marché des biffins de Montreuil
On exclura de l’étude les récupérateurs de matières comme les ferrailleurs pour s’attacher aux objets que l’on peut classer dans les 5 catégories suivantes (Textiles, électronique et électroménager, Jouets, culture, maison)
Que va-t-on mesurer ?
Après quelques heures d’ateliers, nous nous sommes accordés sur une méthodologie de terrain. Nous recherchons des bénévoles qui seraient prêts à venir nous aider à mener cette enquête sur différents marchés, a différents moments. N’hésitez pas à prendre part à l’enquête tant sur le terrain ( en téléchargeant le questionnaire ) que sur le terrain que sur les outils utilisés pour collecter et compiler les données. Merci de nous indiquer par mail (contactez antoine@makesense.org) si vous seriez intéressés pour participer lors des prochains marché le 7 et 18 Septembre, ainsi que le 12 Octobre.
Au delà des aspects quantitatif, nous aimerions aussi collecter des témoignages et des données qui nous serviront à créer une carte participative et un guide culturel pour faire connaitre l’historique de l’activité, les parcours de vie des gens qui font cette activité
Les données relevées sur le terrain et extrapolées en tenant compte des différents biais seront mis en regards des données parisiennes, franciliennes ou nationales collectés auprès de collectivités, d’organismes, d’associations, ou de laboratoires de recherches
Concernant l’aspect socioéconomique, on fera des corrélations entre le temps de vente et le chiffre d’affaire, les moyens de transport et de stockage et le tonnage ; on pourra faire des études sur la saisonnalité et se référer aux publications précédentes du collectif rue marchande pour étayer ce qui a trait au niveau de vie.
Pour l’aspect coût pour la collectivité, on estimera le coût du nettoyage supporté par l’association Amelior, et ceux supportés par la municipalité liés à l’éparpillement des sacs, au nettoyage des espaces de vente, à la répression de la vente à la sauvette ainsi que les coûts de collecte et de traitements évités à la collectivité
Enfin, pour l’aspect environnemental, on mettra en perspective les empreintes écologiques des différents objets types qui sont détournés des ordures par les biffins en affichant pour chacun une analyse de cycle de vie qui permettra de se faire une idée des avantages écologiques à ne pas acheter neufs et à privilégier le réemploi plutôt que les ordures.
Sur le comparateur en ligne de l’Ademe, on observe par exemple que plus du tiers de l’impact environnemental sur tout le cycle de vie d’un Jean dépend de s’il finit aux ordures ménagère ou s’il est réemployé
Antoine Delaunay coordonne le programme “Future of Waste” chez MakeSense dont la mission est de mobiliser des citoyens autour des entrepreneurs sociaux qui inventent et implémentent des solutions qui préviennent et transforment les déchets
Péniche – Salle de projection Amarrée à l’extérieur du Cabaret Sauvage, Parc de la Villette, Paris 19e
Regards croisés de différents acteurs (glâneurs, biffins, chercheurs, collectivités) sur la place du secteur informel dans la gestion des déchets. Comment intégrer ou non ces acteurs au système et pour quels bénéfices ?
De la sécurité (contamination, danger de fouiller dans les poubelles, lieux de collecte à risque, risque de blessures, insécurités liées à la précarité etc.
Insertion par le travail, insertion par le nettoyage, insertion à la fois en termes culturels (migrants) mais aussi en termes de travail (reconnu ou non)
Quel travail avec la ville ? (marché des biffins ? quelles fins de marché ? quelles relations sur la fouille des poubelles ? (Biffe); que faire des déchets collectés ? Quelles relations sur la récupération d’invendus ?
Quels sont les freins observés ? les revendications ?
Projection-débat : les biffins d’ici et d’ailleurs
Péniche – Salle de projection Amarrée à l’extérieur du Cabaret Sauvage, Parc de la Villette, Paris 19e
Projection de court-métrages de présentation du travail et des combats de biffins à Paris et à Bogota suivie d’un débat en présence d’une géographe, de représentants d’associations de biffins et de biffins eux-mêmes.
Intervenants :
Samuel Le Coeur, Président et Co-fondateur, AMELIOR (Association des Marchés Economiques Locaux Individuels et Organisés du Recyclage)
Bénédicte Florin, Maître de conférences en géographie humaine, urbaine, régionale et en géographie du monde arabe à l’Université de Tours