MATIN MIDI SOIR

MATIN

Il est mort et je perçois la transformation de mon existence. Aucune tuile de peau n’a bougé d’un pouce. Aucun cil n’a levé le p’tit doigt.
La transformation est profonde et invisible. Maintenant le monde est un peu plus à moi, ou alors suis-je un peu plus au monde ?

 

cravatte G

 

 

 

Qui plus est, il n’est plus.

 

 

 

Je ne vois pas comment se dire: j’ vais penser la société et rompre avec les philosophies existentialistes.
Mon regard n’est jamais de glace, mon sang à 37 degrés. Une existence ça n’est pas juste une vie.

C’est parce qu’elle est courte que j’ai envie de la partager. C’est parce qu’elle est aujourd’hui que j’ai envie de la vivre.

Rien de moins que l’éblouissement.

Comment a-t-on réussi à se laisser convaincre que puisqu’elle était courte il fallait la garder pour soi ? Qu’il fallait la ramasser, la contenir et lui fabriquer un œuf ?

oeufs GPourtant.

«C’est dans les œufs qu’on aimerait le mieux découvrir des articulations.» Henri Michaux

Le petit mathématicien que nous sommes, mise sur une densité plutôt que sur une étendue. Nous sommes lourds.

Les blancs ne montent en neige que battus. Il y a dans l’agitation quelque chose de merveilleux. Mettons-nous en vie, en mouvement, en neige.

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La vie passe et nous passons notre vie à nous en inquiéter. Une immense partie de notre force est consacrée à une préservation impossible. Alors qu’il ne reste, à la fin, que le changement.

-La Révolution.
-Oui, mais… ça change rien.

Rien ne change rien tout de suite, même la mort ne change pas tout.

J’ai rarement éprouvé une telle solitude.
La solitude d’un malheur qui n’est plus à partager.
Tout le monde a un père, tout le monde le perdra.
Personne n’a le même père.

travelling compensé

La solitude semble statique mais comme l’effet du vertige Hitchcockien, la caméra recule en même temps qu’elle zoome. La solitude n’est pas immobile, c’est plutôt deux mouvements qui s’annulent. Je ne sais pas à quel point nous faisons partie de notre monde, mais la frontière doit être bien fine pour qu’il soit si troublant de sentir le paysage et notre cœur prendre distance.

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De l’homme de l’ouvrage à l’homme du commun

-Je sais pas comment tu fais… j’pourrais pas moi être comme ça tout le temps avec tout le monde.

Je ne suis pas vierge, je ne suis pas violée par la présence des autres. Je ne suis pas privée, mon intimité n’est pas une arrière-salle. Mon intimité affleure à chaque instant de la vie. Elle ne cherche pas à se rendre visible. Elle ne cherche pas à se dévoiler. Elle est déjà nue, et éternellement chez elle.

Nous avons plus de poids à plusieurs, et pourtant le sentiment de peser moins lourd.

Vivre, s’organiser ensemble, faire corps, faire tache, faire feu de tout bois, affronter, caresser, calmer, clamer, riposter, planter, penser, repenser, repasser, replacer, repenser, penser.

Le commun est aussi indistinct que ce que je suis. Être n’est pas un objet mais une action.

Ça n’est pas la pomme que tu me tends que nous partageons.
Ça n’est pas la pomme que nous partageons.
C’est quelque chose dans son pépin que je n’ai pas encore bien compris.

Plus tard la suite… car la vie continue

 

MIDI
Comprendre le pépin compris dans la pomme ou embrasser l’univers par la pensée.

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Le monde doit-il être solide ?

 

 

 

Le monde m’avait toujours semblé se tenir. Jusqu’au jour où il a disparu. Le monde brille par son absence. Le soleil brille sur un monde absent. Je n’ai pas perdu un souvenir par le trou d’une poche. J’ai trouvé quelque chose.

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Il est dans l’ordre des choses d’apparaître et de disparaître.

C’est par nos actions que nous donnons corps au monde et le nôtre n’est emprunté qu’à cet effet.

Est-ce plus facile de mourir en Chine que sous nos pieds ?

Il est bon de nous sentir tous debout, même si toi tu t’es couché. Un soulèvement par vie, une vie de soulèvements rien de moins.

Nos aspirations encore informulées nous inspirent. Pourtant leur formulation n’est pas un but à atteindre. Juste un repère dans la nuit. Le soulèvement veille.

Peut-on rapporter la révolution à une vie, quand sa nature même est d’en déborder ?

L’image du ras le bol ne m’a jamais convaincue. Il ne s’agit pas d’une quantité, d’un contenant rempli, d’un espace saturé.

Ça n’est pas la goutte qui fait déborder, c’est la moindre goutte empoisonnée qui est crachée. C’est une purge par le crachat, une aspiration à la vérité.

Il reste le soleil. Et le monde existe là où ses rayons touchent ma peau.

 

 

 

 

 

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Il reste le soleil, les étoiles nous ont été volées. Les stars ne nous font pas rêver. Les stars ne brillent pas, tout au plus une lampe de poche dans le trou du cul du monde.

Quand vous voyez quelqu’un de connu. Crachez lui au visage.

Le star system n’est pas une cosmogonie, c’est une forme de pornographie existentielle. N’est pas mauvais celui qui consomme de la pornographie. La vérité prend son temps. La vérité s’enterre comme une palourde. Il faut être fin pêcheur pour attraper le vrai sans son exhibition.

1G

Le vrai n’est pas caché sous le voile, comme il ne l’est pas sous la nudité.

Longtemps on a cherché à mettre à nu les femmes, elles ont raccourci leur jupe et cherché la vérité entre leurs jambes. Longtemps on a cherché à mettre à nu les œuvres, et rogner les os de leur concept, longtemps on a cherché la jouissance de la composition musicale dans la variation d’une seule note.

Ce longtemps n’est plus. Il prend enfin fin.

 

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Il est mort et je profite de ce départ pour quitter beaucoup d’autres choses.

 

 

 

SOIR

 

 

Le soir… Plus tard… car la vie continue

Maintenant la suite.

L’histoire du soir se raconte
pour éclairer la nuit à venir
ou
La fiction au service du vrai.

 

Il est mort et ce qui reste en est transformé. L’histoire a changé.
À l’instant même, son histoire s’est montrée autrement. Les mots ne voulaient plus dire la même chose qu’au moment prononcés.

La vie n’est pas indifférente aux histoires qu’on lui raconte.

Alors qu’on a voulu tout faire entrer en nous : le bien, le mal, le ciel, le destin, l’univers tout ça … alors que nous sommes devenus tout et son contraire, il nous faut fuir les enveloppes, pour mieux les habiter, car de fait nous ne sommes pas qu’à l’intérieur. L’époque a perdu sa nature et s’est réfugiée au-dedans des formes.clementineG

 

Nous ne sommes pas une quantité.
Nous ne sommes pas un nombre d’atomes déterminés.

Parti en m’en prenant quelques-uns ?

Nous ne sommes pas rien, nous ensemble, dedans et dehors, dans la vie et la mort.

 

clementine2G

Ah, il est si doux à l’âme d’être révolutionnaire. De porter en soi le sentiment de faire partie du changement.

 

 

 

 

Au cinéma, les personnages de méchants deviennent «humains». On les perce à jour, ils sont fragiles, profonds, sensibles. Des hommes malgré tout. Le mal n’habite pas leur cœur mais leur parcours.

Alors que cela remet en question les limites de nos «Je» et que l’on pourrait s’en croire libérés, voilà qu’on retourne le dehors contre nous !

Tu as mal si je te tape, mais je te tape parce que la vie m’a fait mal. C’est donc la vie qui te tape.

Nous ne serions donc pas le dehors, mais seulement sa victime?

On nous désactive, on nous angoisse.

Tout devient personnel. Le monopole de la subjectivité nous empêche de voir où l’on pourrait porter les coups. Quand tout est relatif, plus rien ne se pose. Tout est filtre. On ne peut plus affirmer car on ne peut plus remonter le cours du mauvais coton que l’on file. On tourne en rond autour de nous-mêmes. Rien n’est tout, donc rien n’est rien.

Là est un bout de l’histoire de notre génération.

Mort, tu es pour moi profondément bon. Le bien, au cœur des choses et aux pointes de leur rayonnement, est une forme de vie.
La vie ne nous fera jamais de mal, c’est la police qui tape.

Les histoires sont comme des chevaliers au service de causes qui s’affrontent, et j’ai une envie sexuelle de moyen âge.

Il y a les histoires qui font du bien et les histoires qui font du mal.

La célébrité, c’est comme une mort avant l’heure. La vie est déjà transformée en histoire. On fait mourir à l’avance des gens que l’on ne connait pas mais avec qui on s’invente les liens les plus intimes. Mort aux pulsions de «Célébrité» ! Nous ne serons célébrés qu’une fois mort.

L’existence ne peut pas s’incarner dans une personne, comme le politique ne peut pas exister en un Monsieur.

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Même s’il porte la cravate.

 

 

 

 

 

Quand il est mort j’ai dit :

Perdre une racine
perdre un pied
bien sûr ça va aller
bien sûr on va continuer

mais on va boiter.

chaussuresG

 

 

 

 

 

 

Là où la vie est amputée.
ou
Perchée sur ses talons, posée sur ses moignons

Ce qui se revendique aujourd’hui être le monde nous déteste. Et fait tout pour nous faire disparaître.

À la surface de la peau on lit parfois beaucoup de choses. Et c’est parce qu’il y a une histoire derrière, que les femmes coupées sont à la mode.

Jambes Plexi

 

 

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La morale progressiste semble prendre l’apparat d’une tolérance remarquable, d’un déplacement des lignes plein de noblesse. Le monde intérieur nous fait croire qu’il va dans le bon sens.

On nous dit : Vous êtes «quelque chose» même quand on en coupe un bout.

Mais.

Je ne veux pas qu’on m’accepte comme je suis. Je ne veux pas rester comme je suis, je veux qu’être avec les autres me change, comme je veux alimenter l’envie de changement des autres.

La plupart du temps nous sommes bien-pensants, pensant penser bien.

Je soupçonne ce qui prend l’apparence d’une morale plus « humaine », d’être animé d’une vilaine intention de préparer le terrain de notre propre disparition.

On veut nous faire passer d’un corps comme « la » raison d’être à un corps qui n’en a plus aucune. Nous sommes un produit et s’annonce la date de péremption. Après nous avoir fait acheter des crèmes régénératrices, on va nous vendre de l’état d’esprit.
Tadam !
Voilà le transhumanisme. On va nous montrer comment nous échapper de nous-même, et nous le facturer. Mise en scène de l’oppression qui se déguise en libération. De la mort en vie. Toujours… et de plus belle. Mise en scène de l’oppression qui se déguise en libération. Toujours… et de plus belle. Mise en scène de l’oppression qui se déguise en libération. Toujours… et de plus belle.

Sur le tapis rouge du festival des révélations, on découvre toujours que ce que l’on avait découvert avant n’était finalement qu’un mensonge.

La libération, c’est le moment où l’on prend la mesure d’une ampleur. N’ayons pas peur du monde, il n’est pas si grand que ça.
Ne fuyons pas nulle part, fuyons partout !

Vivante. Je me sens profondément morale et amorale, dans un équilibre jamais tranquille, jamais chez lui, mais qui cherche à être juste, qui se cherche et s’ajuste.

C’est un pied tout intérieur qui m’est coupé, et qui fait boiter le dedans. Mais au fond comme en l’air tout va bien et se libère.

oui, mais c’est pas réaliste …

Toute vision du futur est une hypothèse.
C’est le moment des histoires.
Place à la vie. La vie sur les places !